Le Maroc est impliqué dans un retentissant scandale de corruption au sein du Parlement européen, à la suite d'une enquête déclenchée par le parquet fédéral belge qui a mis en cause une quinzaine de députés européens dont certains ont avoué avoir fait partie d'une organisation utilisée par les services secrets de Rabat, rapportent plusieurs médias internationaux. L'affaire, qui fait grand bruit à Bruxelles, a débouché notamment sur l'arrestation d'une des vice-présidentes du Parlement, la Grecque Eva Kaili dont le compagnon Francesco Giorgi a avoué jeudi aux enquêteurs belges avoir fait partie d'une organisation utilisée par le Maroc "dans le but d'interférer et d'influencer les affaires européennes", écrit le journal belge francophone Le Soir, sur la base de documents consultés avec le média italien La Repubblica. Le mandat d'arrêt de Francesco Giorgi a été confirmé mercredi par la chambre du conseil de Bruxelles. Dans ses aveux, Francesco Giorgi reconnaît que son rôle dans "l'organisation" était de gérer l'argent liquide. Et ses aveux ne s'arrêtent pas là : il soupçonne deux personnes d'avoir touché de l'argent via l'ancien eurodéputé socialiste Pier-Antonio Panzeri, en l'occurrence l'eurodéputé italien (groupe S&D) Andrea Cozzolino et le Belge Marc Tarabella. Le socialiste a été perquisitionné à son domicile samedi soir en présence de la présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, précisent les médias. Et d'après les documents que Le Soir et La Repubblica ont pu consulter, Antonio Panzeri, Andrea Cozzolino et l'assistant Francesco Giorgi auraient été en contact avec la DGED (Direction générale des études et de la documentation, un service de renseignement et de contre-espionnage au Maroc) et avec Abderrahim Atmoun, ambassadeur du Maroc en Pologne. Outre ce dernier, deux agents du service de renseignement marocain sont cités dans ces documents, d'après la même source. Il y a cinq mois, le service de renseignement belge, assisté d'autres services européens, apprend l'existence d'un "réseau" qui travaille "pour le compte" du Maroc. L'acte dressé par le parquet de Bruxelles montre une incroyable richesse de détails. Et une suite d'opérations décidées et convenues au sein d'un système éprouvé. En fait, chaque démarche vise à mener une "activité d'ingérence" au siège de l'Union européenne (UE) et dans les postes clés des institutions communautaires, en particulier le Parlement. La Repubblica écrit encore : "Le plus actif dans la recherche d'+influence+ est l'Etat du Maroc. Rencontres, entretiens et dîners avec les plus hauts responsables des services secrets de Rabat sont une constante de ce dispositif". La "clique", en fait, a d'abord été branchée par un officier de la DGED, en poste à Rabat. Il s'agit de Belharace Mohammed, qui a également pu compter sur l'intermédiation d'un diplomate basé à Varsovie : Abderrahim Atmoun. Dans le mandat d'arrêt, en effet, sont rapportées les analyses du renseignement bruxellois : les trois de la "clique" collaborent avec les services marocains, il n'y a "aucun doute". (...) Le rôle du diplomate de Rabat qui évolue sur l'axe Varsovie-Bruxelles est central, précise le journal. En fin de compte, tout le monde reçoit ses ordres. Mais il y a un maillon encore plus important dans cette chaîne qui s'est rassemblée autour du Parlement européen : Mansour Yassine, directeur général de la DGED. Les trois l'ont rencontré, selon le quotidien italien. Il s'agit du deuxième scandale de grande ampleur dans lequel le Maroc est impliqué après l'affaire d'espionnage Pegasus, du nom du logiciel développé par une société sioniste (NSO group) qui a permis au Royaume d'espionner des personnalités sur son territoire mais également à l'étranger.