"Hors-la-loi", le film de Rachid Bouchareb, dont la sélection au 63e Festival international de cinéma de Cannes, a suscité en France une campagne hostile chez certains nostalgiques du passé colonial, a été projeté jeudi en avant-première mondiale à Alger, dans le cadre des festivités marquant le 48e anniversaire de l'indépendance et la fête de la jeunesse. Le film n'a remporté aucun prix lors du dernier Festival de Cannes, mais sa participation n'est pas passée inaperçue, car il aborde à travers une fiction, un thème loin d'être superficiel, il s'agit de la lutte du peuple algérien contre l'oppression et son combat pour se libérer de l'occupation française. Ce long-métrage de 2h18 mn a été projeté à la salle El-Mouggar, en présence du réalisateur ainsi que les comédiens, Jamel Debbouze (Saïd), Roschdy Zem (Messaoud), Chafia Boudraa (La mère), Ahmed Benaïssa (Le père) et Bernard Blancan (Colonel Faivre). Il manquait Sami Bouajila (Abdelkader) qui n'a pas pu venir pour des raisons professionnelles. "Hors-la-loi", raconte l'histoire de trois frères, Saïd, Messaoud et Abdelkader. Leurs destins sont différents mais leur combat est le même, celui de vivre en paix et dans la dignité, car ils sont liés par leur attachement à leur mère et à leur patrie. Cette famille a été d'abord dépouillée dans les années 30 de sa terre dans la région des Hauts-Plateaux, puis victime des massacres du 8 mai 1945. L'aîné, Messaoud, engagé en Indochine, s'initie aux techniques militaires et découvre la lutte des Vietnamiens. Plus instruit et politisé, Abdelkader milite dans la clandestinité. Saïd, qui a emmené sa mère à Paris, dans le bidonville de Nanterre, entre dans les milieux marginaux de Pigalle et fait fortune. Au début de la guerre de libération nationale, toute la famille se retrouve à Paris. Responsable au sein de la Fédération de France du Front de libération nationale, Abdelkader amène ses deux frères à le rejoindre dans cette bataille, ils rencontreront aussi des Français solidaires à leur combat. Le film est une sorte de passerelle vivante entre le 8 mai 1945 et les manifestations du 17 octobre 1961, qui porte des images fortes en émotions, affirmant le coté dur du peuple algérien dans sa lutte anti-coloniale, mais en même temps, sa sensibilité. Des métaphores, des symboles ainsi que des messages qui renvoient à des faits et évènements qu'a vécus l'Algérie colonisée et qui reflètent l'amère réalité sociale des Algériens de cette époque, ont dominé le film. Dans une déclaration à la presse, le réalisateur Bouchareb a exprimé son penchant vers l'histoire et la guerre d'Algérie. "L'histoire m'intéresse beaucoup. J'ai eu l'honneur de rencontrer des anciens membres de la Fédération de France du FLN qui m'ont apporté des témoignages poignants sur l'époque de la colonisation française. J'ai également vu beaucoup de documentaires et d'images sur la guerre d'Algérie. Donc, je me suis dit, voilà, le moment est venu pour faire un film la dessus", a-t-il dit. Revenant à la polémique qu'a déclenchée le film "Hors-la-loi", M. Bouchareb s'est contenté de dire : "En France, il y a encore un peu de réticence aux sujets qui traitent du passé colonial de ce pays. Pour moi, ça provient d'une minorité de gens qui sont nostalgiques de ce passé". Pour lui, la campagne lancée contre son film, a "beaucoup contribué à sa promotion à l'échelle mondiale", affirmant qu'elle lui a fait de la publicité. A une question relative à une éventuelle influence de la polémique déclenchée sur l'évaluation du jury du Festival de Cannes, le réalisateur a répondu : "non! pas du tout".