La musique gnawi a su fasciner. Le sentiment est surtout décuplé dans un espace aussi feutré que celui qu'offre la salle El Mouggar à Alger. Gardant toujours le verbe haut dont il s'est fait connaître, le groupe Ferda de Kenadsa avec un Si Larbi, toujours ingénieux, s'est invité vendredi à Alger, l'espace d'une soirée, et ne manquera pas à l'occasion d'éblouir les admirateurs de cette musique qui nous vient du désert. Du grand désert. Une musique qui garde son cachet originel la distinguant de toutes les scories qui s'y sont greffées chez d'autres groupes de musique plutôt versés dans ce que l'on appelle sans trop se gêner la world music. Musique retouchée et essorée qui n'a rien de commun avec la musique originelle. On ne s'y plaît pas souvent, mais avec Ferda, c'est une tout autre histoire, bien que le groupe ait aussi perdu, avec ces dernières créations, de sa superbe, diront, tout déçus, les mordus de ce groupe de Béchar. Les influences, ce groupe qui s'est fait connaître surtout par Ben Bouziane, en compte plusieurs et pas seulement du patelin qui l'a vu se constituer. Les qacidate bien senties de poètes du cru ne laissent pas ainsi d'étonner les habituées de cette musique où la religion se mêle avec le profane jusqu'à s'y confondre. Des admirateurs sont toujours nombreux à trouver chez Ferda des consonances perdues au fil du temps. Avec le mois de Ramadhan, ces textes retrouveront une autre consistance. Toute actuelle. La présence d'une voix féminine en rajoute toutefois à cet environnement feutré et chargé de religiosité. Salam et Ben Bouziane sont des titres par lesquels s'est fait connaître un groupe. Prenant place en demi-cercle, les éléments du groupe joueront à leur manière toute particulière d'instruments comme le karkabou. Lesquels donneront une autre tonalité à une musique qui met au jour la souffrance et les privations auxquelles fait face l'homme noir. Krim el kourama, Nefsi fi nefsi, présents aussi dans leurs premières productions, des opus qui ont toujours fasciné le public, donnent à voir cette souffrance et l'envie de s'en détacher. La musique est là pour aider les plus démunis qui s'y imprègnent sans trop se gêner. Mais tout ce mysticisme n'a pas empêché le public de la salle de faire quelques pas de danse. La souffrance ne laisse pas souvent une colère rentrer mais fait aussi bouger. Ne menant pas grande vie, le groupe ratisse large pourtant.