Le festival de la musique et la chanson touareg touche à sa fin et ne tardera pas à baisser rideau sur six jours d'évocation et d'hommage dédiés à plusieurs siècles de partage culturel et d'expression artistique aussi belle que mystérieuse. A l'image des Touareg, la musique de ce peuple digne et fier a su garder son authenticité malgré les influences multiples dans la région du Sahel, carrefour de nombreuses civilisations et lieu de passage pour le commerce et la culture. Saura-t-elle toutefois résister au troisième millénaire et aux effets de la mondialisation ? Le festival de Djanet, qui est à sa première édition, a été le théâtre d'une querelle sourde entre authenticité et modernisme. Les gardiens de la tradition craignent que le tindi, l'imzad et autres genres musicaux locaux ne se perdent dans le tourbillon de la modernisation. Les assoiffés de modernité que sont les jeunes aspirent quant à eux à marquer du sceau de la nouveauté et des rythmes occidentaux la musique touareg afin de mieux l'exporter au-delà des frontières de la région. La problématique de la préservation du patrimoine musical des hommes bleus est posée et, pour l'heure, la cohabitation pacifique des deux genres, moderne et traditionnel, n'a pas encore signé la fin de milliers d'années d'histoire. Comme toute tradition orale, la musique touareg authentique est otage de la mémoire d'un nombre restreint de gardiens de la tradition. Avec leur disparition, c'est un pan entier de la culture algérienne qui disparaitra. L'urgence aujourd'hui est de trouver des mécanismes de protection de ce patrimoine immatériel en danger de disparition. L'âge avancé des professionnels de la musique traditionnelle touareg et l'intérêt des jeunes pour les sons venant d'ailleurs est aujourd'hui l'amère réalité qui guette, telle l'épée la tête du condamné, la musique targuie. « L'écriture de la musique peut s'avérer un moyen de préserver la musique acquise par la tradition orale, mais au-delà du son que l'on peut transcrire sur la partition, il s'agit pour nous de trouver le moyen de transmettre l'âme et la sensibilité dont la musique touareg est pétrie. Si l'on se contente d'écrire, on fait abstraction de l'essentiel », explique Salah Fethi, enseignant de musique à l'ENS, qui défend l'idée de continuer à préserver la transmission orale à travers l'incitation des jeunes à s'abreuver de la source que sont les artistes et l'utilisation des moyens modernes, tel que l'enregistrement afin de pouvoir conserver l'âme de la musique touareg. Le festival local de la musique touareg a ouvert la compétition à des jeunes artistes venant des régions peuplées de Touareg que sont Tamanrasset, Adrar et Illizi en instituant des prix récompensant les meilleures prestations sur scène. Trois prix d'une valeur oscillant de 100 000 à 200 000 DA récompensent la meilleure troupe musicale et trois autres prix récompensant les meilleurs artistes, dont la valeur varie de 50 000 à 100 000 DA, seront décernés ce soir, à la clôture du festival. L'artiste tlemcénien cheb Anouar donnera les dernières notes musicales de ce festival.