Une cinquantaine d'experts de la lutte antiterroriste africains, européens et américains prennent part à un séminaire de 5 jours consacré au financement du terrorisme et au blanchiment d'argent. Les régions ciblées sont l'Afrique du Nord et de l'Ouest, utilisées par le GSPC ou Al Qaïda du Maghreb comme base arrière. Une cinquantaine d'officiels civils et militaires de l'Afrique du Nord et de l'Ouest prennent part depuis lundi à un atelier de renforcement des capacités africaines en matière de lutte contre le terrorisme et son financement organisé à Alger, par le Centre africain d'étude et de recherche sur le terrorisme (Caert) et en coordination avec le Centre d'étude stratégique d'Afrique (Cesa). Les participants à ces travaux, qui se déroulent à huis clos sont les représentants des pays d'Afrique du Nord et de l'Ouest, engagés dans le partenariat transaharien de lutte contre le terrorisme et les points focaux sous-régionaux et nationaux du contre-terrorisme et les responsables de lutte contre le financement, du renseignement et de la sécurité des frontières (terrestres, marines et aériennes). Les animateurs de l'atelier sont des spécialistes désignés par les gouvernements américains et africains, mais aussi des universitaires ou chercheurs non américains et des experts issus d'organisations internationales, connus pour leurs compétences en la matière. Les travaux seront axés essentiellement sur « la lutte contre le financement du terrorisme en Afrique du Nord et de l'Ouest et le renforcement des capacités locales et de coopération régionale et internationale, afin de réglementer, surveiller, enquêter et stopper les transferts de fonds destinés au financement et au soutien des groupes terroristes, ainsi qu'à leurs opérations ». Les objectifs assignés se résument à quatre points importants. D'abord, « le renforcement des capacités des pays africains en matière de lutte contre le terrorisme en améliorant les services de renseignement financier, la prévention contre les abus faits par les organisations à but non lucratif et l'instauration de mesures contre le blanchiment d'argent et les convoyeurs de fonds ». Le deuxième objectif a trait à « la compréhension des initiatives clés » à l'échelle africaine et mondiale pour lutter contre le financement du terrorisme, notamment celles pilotées par l'Union africaine, le Caert, l'ONU et le GAFI. Il est aussi question de l'amélioration de la coopération entre organismes et interministérielle dans le domaine de la collecte, l'analyse et le partage du renseignement et de l'information sur le terrorisme aux échelles nationale, régionale et internationale. Enfin, le quatrième objectif est lié à « la proposition de méthodes concrètes » pour une mise en œuvre « améliorée et plus efficace » du plan d'action de l'Union africaine sur la prévention et la lutte contre le terrorisme. Pour les organisateurs, il est surtout question de « pérenniser la coopération entre les pays participants et élargir le champ de formation et d'éducation aux menaces liées au terrorisme dans la perspective de trouver les mesures constructives pour les traiter ». Au cours des sessions plénières, les experts pourront avoir « une meilleure approche du phénomène du terrorisme dans les régions concernées, ressortir les liens avec la menace terroriste globale et cerner les meilleures méthodes de riposte ». « Les signaux alarmants » Intervenant à l'ouverture des travaux, Boubacar Gaoussou Diarra, directeur du Caert, a commencé par saluer le rôle « éminent » de l'Algérie dans la prévention et la lutte contre le terrorisme sur le continent africain, avant de rapeller que ce sont les attentats du 11 septembre 2001 qui ont mis au jour l'action de réseaux financiers internationaux du terrorisme et, de ce fait, la coopération internationale s'est concentrée sur le gel des fonds et avoirs appartenant à Al Qaïda, ainsi qu'à des personnes et entités associées. Il est revenu sur les nombreuses mesures prises par l'ONU dans ce cadre pour rendre plus contraignant le cadre juridique international de lutte contre les sources de financement du terrorisme. Le directeur général a mis en garde contre ce qu'il a appelé des « signaux alarmants quant aux liens entre le terrorisme et le crime organisé, de plus en nombreux ». Dès lors, a-t-il ajouté, « la question qui se pose est celle de savoir comment assurer la stabilité des institutions politiques, la sécurité des Etats et des populations du continent et surtout comment protéger les économies de la perversion du crime organisé ; en bref, de l'argent sale qui corrompt tout le monde ». Il s'est également demandé comment empêcher l'Afrique de servir de base arrière ou de source de financement pour les terroristes et comment diffuser l'information relative aux risques de financement du terrorisme et assurer ainsi une meilleure collaboration entre les Etats. Pour Boubacar Gaoussou Diarra, « le crime organisé, le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme portent atteinte à l'intégrité des systèmes politique et judiciaire, à la stabilité et à la prospérité des Etats. De même que la globalisation du commerce, la déréglementation, l'accès facile à Internet, qui constituent certes des opportunités, ont eux aussi leurs revers. Le continent qui s'ouvre aux capitaux privés devient ainsi une cible non seulement pour le blanchiment mais aussi pour le financement du terrorisme ». Il a expliqué que la prédominance de l'argent liquide dans les transactions financières des jeunes économies africaines, la prévalence des circuits informels sont porteuses de risques. De ce fait, il a exhorté les Etats à réfléchir sur la manière d'empêcher la prolifération de « réseaux terroristes d'Al Qaïda au Maghreb et le recours, par cette organisation, à des sources de financement tels que le kidnapping et la demande de rançon, la prise d'otages, le racket, le commerce de la drogue et la contrebande ». Pour sa part, l'ambassadeur des Etats-Unis d'Amérique en Algérie, M. David Parce, a indiqué que ce séminaire a pour but de « renforcer les capacités des organisations régionales et sous-régionales de l'Afrique dans le contre-terrorisme et pérenniser la coopération entre et au sein des organisations qui luttent contre le terrorisme ». L'ambassadeur américain a estimé qu'« il faut encourager le développement économique des pays africains afin d'enlever toute couverture politique aux terroristes, tout en procédant à l'isolement de leurs sources de financement ».