Les jeunes de la commune de Cap Djinet, à 30 km à l'est de Boumerdès, sont frappés de plein fouet par le chômage. Hormis le secteur de la pêche, qui emploie une petite partie de la population, aucun autre secteur ne peut prétendre offrir des possibilités d'emploi. Nonobstant les potentialités dont dispose cette commune côtière, et qui peut être un pôle touristique, Cap Djinet est loin d'atteindre le niveau de vie qui doit être le sien. L'oisiveté a provoqué un marasme profond au sein de la population, les jeunes en particulier. Cela a incité beaucoup d'entre eux à fuir la région pour aller sous des cieux « plus cléments ». Nombreux sont ceux qui ont tenté la traversée de la mer dans des embarcations de fortune. Cette commune est devenu l'un des « points de départ » les plus importants pour les « harragas ». L'année dernière trois personnes avaient péri au large de Cap Djinet lorsque leur embarcation avait chaviré. Ce phénomène est encouragé, selon la population locale, par la situation socioéconomique et l'absence de moyens pour les jeunes dans toute la région. Un jeune diplômé de l'université nous dit que « la situation est difficile, surtout quand il s'agit de trouver un job ». Et d'ajouter : « C'est pour cette raison que nous cherchons à partir ailleurs, il n'existe aucune perspective pour s'émanciper dans notre commune. » Par ailleurs, des jeunes désemparés que nous avons rencontrés en ville, nous ont fait savoir qu'ils n'ont que de travail saisonnier pour survivre. C'est grâce à la saison estivale lorsque beaucoup de jeunes ont la possibilité d'exercer un petit commerce au bord de la mer qu'ils assurent quelques rentrées d'argent pour tout le reste de l'année. D'ailleurs des baraques de commerce informel envahissent la côte, et « polluent » les belles plages de Cap Djinet. Les pouvoirs publics ne peuvent-ils pas offrir de meilleures possibilités à ces jeunes et en même temps de meilleures conditions aux estivants ? « Ce que nous voulons c'est bien un travail stable, nous ne voulons pas vivre éternellement dans la précarité », nous dit un jeune de 22 ans qui se dirige vers la carrière, située à l'entrée ouest de la ville, à la recherche d'un emploi. Cette carrière de la ville de Cap Djinet emploie un nombre important de j eunes, mais elle ne peut régler le problème du chômage dans la région. Et des voix s'élèvent pour dénoncer des « atteintes à l'environnement » suite aux activités d'extraction et de broyage de la pierre. Résultats de cette situation déplorable à Cap Djinet : prolifération de commerce informel, dégradation du cadre de vie et le sentiment d'exclusion chez la jeunesse. L'annonce de projets de réalisation d'infrastructures publiques n'a pas contribué à diminuer le sentiment de frustration chez la population de la région. On y prévoit la construction d'un centre culturel dans la ville pour un montant de 150 millions de dinars et une salle omnisports ainsi qu'une piscine pour une somme de 400 millions de dinars, a-t-on appris auprès des responsables. Mais les jeunes se sentent marginalisés. A cela s'ajoute le projet CAP 2015, annoncé par le patron de Cevital, et qui prévoit la réalisation d'un hub portuaire sur une superficie de 5000 ha avec plus de 20 km de longueur. La seule « chance vraiment sérieuse pour toute la Kabylie », lance un jeune chômeur. Cevital prévoit l'installation de dizaines d'unités industrielles à Cap Djinet, spécialisées dans la sidérurgie, la pétrochimie, l'électricité, et la construction navale, entre autres. On a annoncé aussi une unité de dessalement de l'eau de mer. Ce projet est attendu comme une bouée de sauvetage par des centaines de jeunes. En attendant la population continue de vivre dans la léthargie.