Visiblement remontée contre l'état de désastre dans lequel est plongé le pays, la patronne du PT a usé d'un vocabulaire mordant pour dire toute son indignation. Pour elle, l'affaire des 701 kg de cocaïne saisis au port d'Oran, le 29 mai dernier, «a fait tomber les masques et révèle une maffiotisation des institutions de l'Etat déjà gangrenées par la corruption généralisée». A la veille d'une rentrée politique et sociale porteuse de risques, la secrétaire générale du Parti des travailleurs, Louisa Hanoune, dresse un tableau de bord national où tous les indicateurs sont au rouge. Le pays vit «une congestion politique, pris dans une spirale de récession économique et de détresse sociale, le tout dans un Etat qui perd de son autorité aux plans interne et externe», résume Louisa Hanoune lors d'une conférence de pesse qu'elle a animée hier à Alger. Avant de prévenir : «N'importe quelle étincelle peut mettre le feu partout.» Visiblement remontée contre l'état de désastre dans lequel est plongé le pays, la patronne du PT a usé d'un vocabulaire mordant pour dire toute son indignation. Pour elle, l'affaire des 701 kg de cocaïne saisis au port d'Oran, le 29 mai dernier, «a fait tomber les masques et révèle une maffiotisation des institutions de l'Etat déjà gangrenées par la corruption généralisée. Pis, une escobarisation du système». Aller vers une élection présidentielle dans ce «contexte dangereux, c'est conduire le pays vers l'inconnu, c'est aller vers l'abîme», estime-t-elle. «Nous refusons de nous embarquer dans le débat stérile sur le 5e mandat, parce qu'il contourne la question centrale qui est celle de la nature du régime politique, d'autant plus que personne ne sait ce qui va se passer d'ici-là. Faut-il changer un homme pour le remplacer par un autre ou changer un système escobarisé ? C'est signer l'arrêt de mort du pays», prévient-elle. Encore plus offensive dans sa charge, elle estime que «le système politique en place doit disparaître, sinon il enterrera l'Algérie. Nous avons fait le choix de sauver le pays et dégager le système, et c'est pour cela que nous réclamons la convocation en urgence l'élection d'une assemblée constituante, car elle est la solution». C'est la bataille centrale qu'a engagée Louisa Hanoune en lançant une campagne nationale depuis des mois pour convaincre les citoyens de la nécessité de se mobiliser autour de ce projet. «C'est la bataille décisive qu'il faut mener si l'on veut sauver le pays et lui ouvrir une ère nouvelle en l'installant sur une voie démocratique véritable. Face à un état de dislocation sociale, il faut créer une dynamique politique pouvant permettre une reconstruction nationale. La convocation d'une Assemblée constituante permettra d'ouvrir un débat politique national large en impliquant tous les Algériens autour des questions qui engagent l'avenir de la nation», préconise la dirigeante du Parti des travailleurs. Il n'y a rien à espérer du régime politique en place, juge-t-elle. «Ce système politique en place depuis l'indépendance est escobarisé, il ne peut rien offrir et il ne peut pas se réformer», fustige-t-elle encore, considérant que «toutes les réformes politiques engagées par le passé ont toutes échoué». Elle en veut pour argument l'incapacité de l'Etat à lutter contre la corruption. «Le 20 août célébrant le double anniversaire de l'insurrection du Nord-Constantinois et le Congrès de la Soummam, le président de la République appelle dans son message à un front populaire contre la corruption et la drogue ! Soit. Lutter contre la corruption n'est pas l'affaire des citoyens, mais c'est de la responsabilité de l'Etat de combattre ce fléau mortifère. Les citoyens veulent que leurs droits soient respectés, que cessent toutes les formes de répression, que cesse le harcèlement contre la presse. La lutte contre la corruption est du ressort de l'Etat, mais tout le monde sait que toutes les institutions sont gangrenées, les instances créées à cet effet sont totalement paralysées. La lutte contre la corruption suppose une volonté politique véritable», tempête Louisa Hanoune qui juge impossible d'opérer des révisions ‘'déchirantes'' dans le cadre du système actuel. «Seul un système démocratique peut prémunir le pays contre toute menace», assure-t-elle encore. «Angoisse de lendemains incertains» Au plan social – un des aspects stratégiques qui fondent le Parti des travailleurs – Louisa Hanoune décrit une situation intenable pour la majorité des Algériens plongés dans la paupérisation en raison des politiques d'austérité mises en place par le gouvernement. «Le pouvoir d'achat a chuté de 60% depuis 2014 à cause des lois de finances antisociales et antinationales. Les chiffres officiels sur l'inflation sont faux. Les parents sont contraints de faire travailler leurs enfants pour subvenir aux besoins les plus élémentaires, les entreprises n'assurent plus les salaires des travailleurs, les hôpitaux agonisent, des diplômés sans emploi viennent grossir les rangs d'un chômage galopant», assène la secrétaire générale du PT. Tour à tour, elle accable le ministre du Commerce, qui s'est montré incapable de contrôler un secteur gangrené par la fraude, l'ancien ministre de la Santé, Abdelmalek Boudiaf, et sa loi sanitaire, le ministre du Travail, Mourad Zemali, qui méprise les diabétiques, le ministre de l'Enseignement supérieur, Tahar Hadjar, qui «envoie un message aux étudiants les invitant à ne pas faire d'effort». Au passage, elle charge également le directeur de l'Institut Pasteur (sans le nommer) qui compare l'Algérie à un Yémen en guerre en parlant du choléra qui y fait fureur. Elle déplore une situation de dislocation sociale faisant peser sur les citoyens «l'angoisse de lendemains incertains». Au rythme où va le train social des Algériens, «pas que le choléra, d'autres épidémies révolues vont refaire surface» fulmine l'opposante de gauche. Abordant la loi de finances 2019 en cours d'élaboration au niveau du gouvernement, Mme Hanoune prend acte du fait qu'elle ne comporte pas de nouvelles taxes, mais appelle «à intégrer des mesures pouvant redonner espoir aux couches les plus défavorisées». Hanoune «crucifie» mohamed Aïssa Interrogée au cours de sa conférence de presse à propos de la curieuse initiative du ministre des Affaires religieuses, Mohamed Aïssa, d'instituer un «cartable de l'orphelin» pour la rentrée scolaire, la patronne du PT se dit étonnée d'une telle démarche. «D'abord au PT, nous sommes contre le mélange entre le politique et le religieux et d'ailleurs une enquête sérieuse menée par le Crasc a montré que les Algériens sont favorables à un Etat séculier», lance-t-elle. Et pour l'achever, elle ajoute : «Ce ministre n'en finit pas avec ses dérives, il se comporte comme le clergé. L'affaire de la pauvreté ne le regarde pas, qu'il s'occupe de ce qui le regarde, les affaires religieuses. C'est la régression sociale qui a amené l'affreux couffin du Ramadhan érigé en système social, et maintenant lui nous invente le "cartable de l'orphelin". Basta !» H. O.