Malgré ses potentialités et son riche passé historique, la commune de Bordj Ménaïel vit un marasme sans précédent. La ville des Coquelicots, jadis charmante et accueillante, se clochardise de jour en jour. Les stigmates du séisme du 21 mai 2013 sont encore visibles au centre-ville. Au boulevard Amirouche, de nombreuses habitations et des locaux commerciaux tardent à être reconstruits à cause des problèmes d'héritage. Le problème constitue un véritable casse-tête pour les autorités locales. Le P/APC, M. Derridj, dit avoir engagé un notaire et créé un comité spécial pour se pencher sur ce dossier. Forte d'une population de plus de 90 000 habitants disséminés sur 17 villages, la commune semble payer les conséquences de l'extension anarchique de son tissu urbain. Plusieurs cités ont pris forme au sud et à l'est de la ville, mais elles sont dépourvues d'équipements publics. Le maire parle d'un déficit de six écoles primaires et d'un manque criant d'infrastructures de jeunes. Bachir Maâtouk, un ancien pharmacien, évoque avec nostalgie les années de gloire de cette ville commerciale par excellence, connue pour avoir été un point de relais des cavaliers (imnayen) au temps des Ottomans. «Toutes les communes se sont développées sauf Bordj Ménaïel. Tout ce qui faisait sa notoriété a disparu. Dans les années 1970, on avait trois salles de cinéma, elles sont toutes fermées. Kateb Yacine s'était produit à la salle Royal en 1975. C'est moi qui l'ai invité en tant que responsable du comité des jeunes du FLN. Aujourd'hui, tout s'est dégradé», regrette-t-il. Les quartiers Tahrir, Bousbaâ, Bastos et Vachy manquent de tout. Selon le chef de daïra, 28% des foyers de la commune ne sont pas encore alimentés en gaz naturel. Ce combustible se fait désirer même au niveau des cités Boukhil, Amrous et des villages de Aïn El Hamra et Rouafaâ, pourtant très proches du chef-lieu. Le réseau routier est dans un état catastrophique, 92 km de chemins communaux et 22 km de chemins de wilaya traversant la commune nécessitent des travaux de revêtement, indique le même responsable. Le projet d'amélioration urbaine inscrit en 2012 pour 330 millions de dinars s'éternise. «On est à 50% d'avancement. Il nous reste 11 000 mètres à bitumer et 2300 m de réseau d'assainissement. L'entreprise devra terminer d'ici la fin de l'année», a précisé un cadre de la DUC jeudi dernier, à l'issue d'une rencontre ayant regroupé le wali et les directeurs de l'exécutif, des élus et des représentants de la société civile. Néanmoins, certains se sont montrés sceptiques quant au respect de cet engagement. Outre la prolifération des ordures, les habitants de Bordj Ménaïel se plaignent du manque d'infrastructures de jeunes et de divertissements. «On n'a pas besoin de grands stades, mais juste d'aires de jeu homologuées et gazonnées. L'ancien wali nous en avait promis trois. On n'a rien vu pour le moment. La bibliothèque communale, achevée en 2016, tarde à être ouverte faute d'équipements, alors que le projet de piscine avance lentement», se plaint Anis, un technicien au chômage. Et d'ajouter : «On a trois zones d'activité, mais elles ont été transformées en zones d'habitation. On n'y trouve que des salles des fêtes. On a une unité de Socothyd, mais elle est fermée depuis plus de dix ans. A présent, il n'y a que l'usine de BCR qui fonctionne.»