Si la candidature de Bouteflika, qui est toujours dans l'attente de son officialisation, répond réellement à une aspiration du peuple algérien comme ne cessent de le clamer ses comités de soutien, pourquoi alors toute cette débauche d'énergie et de moyens pour porter la candidature d'un homme dont l'élection ne devrait souffrir aucune équivoque si l'on suit ce raisonnement ? Il est un fait que Bouteflika, qui a perdu la verve et la fraîcheur physique de son premier mandat, ne pourra pas labourer le champ électoral avec la même fougue en sillonnant le pays comme il l'avait fait précédemment. D'où l'importance, cette fois-ci, du rôle des comités de soutiens qui sont appelés à compenser le déficit en termes d'engagement et de présence sur le terrain du candidat Bouteflika lors de la campagne électorale. Mais Bouteflika n'est pas homme à compter sur autrui et à vouer une confiance aveugle à tous ceux qui lui font allégeance. Il l'a démontré tout au long de ses deux mandats. Même contre l'avis de ses médecins, il n'hésitera pas à aller battre campagne autant qu'il le pourra. D'abord pour tenter de mobiliser l'électorat en vue de l'inciter à aller voter massivement. Les tendances lourdes sur ce plan incitent plutôt au pessimisme. Les initiatives prises par le ministère de l'Intérieur pour ouvrir des bureaux de vote dans les universités, les caravanes de sensibilisation autour du prochain scrutin mises en branle à travers le pays sont les signes patents que la machine électorale est loin de s'emballer. Le spectre de l'abstention hante Bouteflika qui a déjà bien du mal à se défaire de l'image de président mal élu qui lui colle à la peau. On se souvient de la polémique sur le taux réel de participation à l'élection présidentielle de 2004 ! Il est certes facile de bourrer les urnes dans un pays où la fraude est une seconde nature. Mais il est difficile, en revanche, de créer partout, devant tous les bureaux de vote, les longues files d'électeurs synonymes, pour le pouvoir, d'un scrutin réussi et d'une légitimité populaire incontestée. Tout l'art consommé de l'Entv qui sait jouer, dans ce genre de situation, sur les effets d'optique ne pourra rien contre cette épreuve de vérité. Un véritable casse-tête donc pour Bouteflika qui ne souffrirait pas de se voir élu (de nouveau ?) avec un faible taux de participation électorale. D'autant qu'il sait que, cette fois-ci, il ne bénéficie d'aucun état de grâce. Ses meilleurs arguments pour convaincre les citoyens à aller voter en masse et en faveur de sa candidature résident dans les bilans de ses deux mandats successifs qui plaideront pour lui ou contre lui le jour du scrutin. Les promesses électorales de Bouteflika en matière de logement, d'emploi, de justice sociale, de redistribution des richesses dans une conjoncture économique et financière exceptionnelle pour l'Algérie, de rétablissement de la paix et d'autres ont-elles été tenues ? La campagne électorale devrait être un moment privilégié pour faire un état des lieux sans complaisance. Y a-t-il dans le spectre des candidats engagés dans la course électorale des hommes et des femmes qui auront ce courage politique de croiser le fer avec Bouteflika comme l'avait fait Benflis avec les conséquences que l'on sait ? Quand bien même il pourrait s'en trouver, des candidats avec un tel profil auront-ils les moyens (financiers) de leur politique pour faire passer leur message ?