Profitant du retard non annoncé du vol qu'il devait emprunter, ce passager-contrôleur avait pratiquement assiégé le guichet Air Algérie pour faire part aux deux préposés de cette compagnie d'un grand nombre de réclamations. Loin de ce stade de réaction et comme s'il accomplissait une perquisition en bonne et due forme, il prit le soin de noter toutes les anomalies. Ces dernières étaient nombreuses dans ce hangar d'acier vieilli pompeusement qualifié d'aérogare Rabah Bitat de Annaba. Chaises en plastique brinquebalantes, sol noir de saleté, murs et plafonds poussiéreux, toiles d'araignée, restaurant toujours fermé avec pour clientèle attitrée rongeurs et autres insectes nuisibles, avaient agressé le regard de Miguel Silvestre décidé à ne pas s'arrêter là. Il poursuivit sa perquisition par une visite au comptoir d'enregistrement pour noter la présence de micro-ordinateurs d'enregistrement passagers défectueux, des fils électriques à l'air libre, l'inexistence de caoutchouc isolant sur le tapis roulant à bagages. Le sursaut qu'il eut à l'approche des toilettes hommes et femmes et les doigts qu'il mit sur son nez étaient très expressifs. Ces toilettes étaient dans un état digne de la préhistoire avec en sus des odeurs d'urine insupportables. A quelques mètres de là, assise sur des chaises en plastique à haut risque, une soixantaine de passagers attendait stoïquement la fin de leur calvaire. Rien, pas une seule petite information ne leur était donnée sur le pourquoi du retard ou le changement d'horaire de leur vol sur Alger. «Dites que j'ai été hospitalisée durant plusieurs semaines pour une infection urinaire après avoir utilisé ces toilettes très mal entretenues. Dites que nous n'avons rien, même pas le minimum des conditions de travail, pour répondre à l'attente de notre clientèle. Nous en avons assez de servir de boucs émissaires sur lequel tout passager peut déverser sa colère. La présence de ce contrôleur de l'IATA, ses remarques désobligeantes vis-à-vis de la prestation de service offerte par la compagnie, sa volonté de faire application des dispositions de la convention de Varsovie pourront-elles amener les responsables à accorder plus d'attention à cette situation ?», a indiqué un agent d'Air Algérie approuvé par plusieurs de ses collègues. Toute cette situation n'avait pas échappé à Miguel Silvestre qui a pratiquement procédé à une large revue de l'infrastructure aéroportuaire. «J'ai fait pratiquement de nombreuses villes aéroportuaires d'Afrique, y compris dans des pays sous-développés. Je n'ai jamais été confronté à une infrastructure aussi sale et où l'insécurité est partout comme dans cet aéroport. Il m'importe peu que les responsables locaux algériens se préparent à lancer dans les prochains jours la réalisation d'une autre aérogare. Il y a cette aérogare internationale de Annaba qui ne répond absolument pas aux conditions de transport aérien mondialement appliquées», a-t-il indiqué à la préposée d'Air Algérie. «Je ne nie pas que notre infrastructure est dans un état lamentable. Nous faisons ce que nous pouvons pour l'entretien et la maintenance en attendant la réception de la nouvelle aérogare dont les travaux seront incessamment lancés. Pour améliorer la situation, nous avons lancé depuis plusieurs mois une opération de grande envergure d'entretien, d'hygiène, de dératisation et de désinsectisation», a déclaré un des responsables de la direction de l'Entreprise de gestion des services aéroportuaires (EGSA).