Dans un discours prononcé hier à l'occasion de la journée de la femme, le 8 mars, le chef de l'Etat affirme que les femmes occupent encore une place « trop limitée », notamment pour les fonctions électives. En insistant sur les instances « électives », qui ne sont bien évidemment pas de son ressort, le premier magistrat du pays renvoie la responsabilité aux « autres », aux partis politiques, aux syndicats, aux associations… Le président Bouteflika n'est pas à sa première sortie du genre. En relevant, lors de son allocution du 24 février à Arzew, l'occupation par des personnes qui ne sont pas dans le besoin d'une partie du million de logements qu'il aurait construit durant son deuxième quinquennat, le chef de l'Etat a plutôt mis la responsabilité sur le dos des citoyens qu'il a appelés à dénoncer de tels abus. Le Président n'est donc nullement responsable de toute situation reflétant soit l'inégalité sociale soit l'inégalité des sexes ! Si le chef de l'Etat tente de focaliser l'attention des Algériens sur la présence de la femme dans les assemblées élues, la réalité est bien apparente pour qu'elle soit aussi facilement occultée. En dépit de son large champ de nomination à différents postes de responsabilité, la femme occupe toujours une place bien « trop limitée » dans les institutions de l'Etat. A commencer par le gouvernement. Sur 26 ministères et 4 ministères délégués, on ne trouve que trois femmes, à savoir Khalida Toumi, ministre de la Culture, Nouara Saâdia Djaffar, ministre déléguée auprès du ministre de la Solidarité nationale, de la Famille et de la Communauté nationale à l'étranger, chargée de la Famille et de la Condition féminine, et Souad Bendjaballah, ministre déléguée auprès du ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, chargée de la Recherche scientifique. La tendance est la même au niveau des autres fonctions nominatives. Sur les 48 walis nommés par le chef de l'Etat, il n'y a qu'une femme. Aussi, combien de femmes représentant la diplomatie algérienne dans les nombreux pays avec lesquels notre Etat entretient des relations diplomatiques ? Combien sont-elles chefs de daïra ? Combien sont-elles chefs d'entreprise publique ? Elles se comptent sur les doigts d'une seule main. Il semble ainsi que la nomination de femmes à de hautes fonctions n'est pas incluse dans le programme de promotion entrepris par le chef de l'Etat, qui a instruit hier le ministre de la Justice d'installer une commission pour proposer un projet de loi organique en faveur d'une plus grande participation de la femme dans les seules « assemblées électives ». Pour le Président donc, la femme est trop occupée à effectuer des tâches ménagères et à élever ses enfants pour qu'on lui confie de hautes responsabilités. « Il est difficile de mettre en avant l'accès des femmes aux postes de décisions, sans souligner parallèlement que la responsabilité des enfants et les obligations familiales leur incombent souvent, sinon toujours exclusivement », a-t-il soutenu. Cela tout en se félicitant que les femmes ne sont pas totalement « absentes » du domaine politique. Il relève, dans ce sillage, le rôle « déterminant » des partis politiques dans la promotion de la femme, considérant « inconcevable et inacceptable » que la femme « reste toujours classée en fin des listes électorales ». Là encore, le Président stigmatise les formations politiques pour qu'il reste au-dessus de la mêlée…