Tout cela en raison du fait que l'Irak post-Saddam Hussein a choisi la voie la plus complexe sans que cela assure au pays une réelle stabilité. Mais en attendant, le temps pourrait s'avérer long, et comme il en sera ainsi, il sera meublé par les différentes supputations, du genre «on a gagné», entendre par les groupes les plus influents qui revendiquent tous la victoire, et autres accusations de fraude, car depuis vendredi, il n'en manque pas. Et de telles accusations renvoient à leurs études ces milliers d'observateurs, dont la conclusion était que le scrutin de jeudi était conforme aux standards internationaux. Les principaux candidats de la liste menée par l'ex-Premier ministre Iyad Allaoui ont dénoncé en effet des pressions politiques pour influencer le résultat du vote et des fraudes. «Les résultats annoncés ne sont pas exacts et sont destinés à influencer l'opinion publique», a affirmé Mehdi Al Hafez, en référence aux informations sur une victoire écrasante de la liste rivale de l'AUI dans plusieurs des neuf provinces chiites au sud de Baghdad. «De nombreuses violations ont eu lieu et une grande inquiétude se répand parmi les électeurs qui ressentent que des organes étatiques et la Commission électorale ont failli à leur mission», a ajouté cet ancien ministre du Plan. Samedi, le Premier ministre sortant, Ibrahim Jaâfari, a rencontré dans la ville sainte de Najaf, au sud de Baghdad, le grand ayatollah Ali Sistani et le chef radical chiite Moqtada Sadr. Ce dernier a proposé la mise en place d'une commission, formée de représentants des partis ayant participé aux élections, pour superviser le décompte des voix, entrepris par la Commission électorale indépendante «afin d'éviter toute fraude et manipulation des votes». M. Hakim, chef de la majorité parlementaire sortante, avait mis en garde, à plusieurs reprises, contre d'éventuels cas de fraude lors des législatives. Quant à la Commission électorale, elle a refusé de fixer une date exacte pour l'annonce des résultats, donnés pour la fin de l'année, voire début 2006, alors que des centaines de partisans de différentes listes ont commencé à célébrer leur «victoire». «Je m'adresse à nos frères à Mossoul, Ramadi et Tikrit et je leur dis que vos frères à Najaf, Kerbala et Hilla ont attendu longtemps pour travailler avec vous, main dans la main, sous la coupole du prochain Parlement afin de bâtir le nouvel Irak», a déclaré Ibrahim Jaâfari à Najaf. Il faisait référence à trois villes à majorité sunnite, et aux principales villes chiites au sud de Baghdad. S'adressant ensuite aux religieux sunnites, il les a appelés à «utiliser leur position pour répandre les principes d'unité et de liberté». Les sunnites, qui avaient boycotté le scrutin de janvier, ont participé en masse jeudi aux législatives pour réintégrer le jeu politique. M. Jaâfari a appelé «les baâthistes à participer avec leurs frères à la construction de l'Irak, car le peuple les considère avec de la compassion». Cette position tranche avec celle de l'allié de M. Jaâfari, le Conseil suprême de la révolution islamique en Irak qui prône une purge à outrance des partisans du parti Baâth de l'ex-président Saddam Hussein. MM. Jaâfari et Hakim sont assurés d'être réélus, étant les poids lourds de la liste de l'Alliance unifiée irakienne (AUI), victorieuse des précédentes élections. Des tractations qui ne devraient pas faire oublier la violence. Celle-ci a repris en Irak après l'accalmie des législatives, faisant treize morts en quelques heures. Huit des treize victimes, tombées depuis samedi soir, sont des membres des forces de l'ordre, tués dans différentes attaques à Baghdad et au nord de la capitale, selon des sources de sécurité. Parmi les autres tués figurent notamment deux parents d'un responsable de l'Union patriotique du Kurdistan (UPK), Khodr Hassan Al Hamdani, à Kirkouk (nord), ainsi que Ali Karim Al Assadi, un chiite membre de l'Organisation Badr, l'ex-bras armé du Conseil suprême de la révolution islamique en Irak (CSRII), le principal parti chiite d'Irak, tué à Baghdad. De son côté, l'armée américaine a fait état de la mort d'un marine vendredi par un tir «non hostile», à l'ouest de Baghdad. Selon le Pentagone, 2156 soldats et personnel assimilé militaire américains sont morts en Irak depuis l'invasion du pays en mars 2003. Un décès qui tombe plutôt mal pour le président américain pressé d'annoncer une échéance pour le retrait de son armée d'Irak. Ce qu'il refuse de faire. D'ailleurs tout laisse penser que cette présence va durer, et même longtemps.