Plus de deux mois après la guerre sanglante menée par Israël contre la bande de Ghaza et qui avait fait plus de 1300 morts et 5000 blessés, le drame se poursuit au quotidien pour les Palestiniens. « La tristesse ressentie après la mort de ceux qu'on aime reste vive, nous confie Ahmad Abd Rabo, un jeune père de famille dont le frère a été abattu par un sniper israélien lors de l'occupation de Ezbet Abd Rabo, au nord de la bande de Ghaza, où les dégâts matériels et les pertes en vies humaines ont été des plus importants. Regardez autour de vous, rien n'a changé depuis le départ des troupes israéliennes. Pas un kilo de gravats n'a été déblayé. L'hiver, particulièrement froid, se prolonge et le fait de rester sous les tentes nous rappelle chaque minute le drame que nous avons vécu et qui continue. On entend parler de milliards pour la reconstruction mais pour nous, ce sont des paroles en l'air. L'euphorie des premiers jours du retrait laisse peu à peu la place au désespoir. » Le drame est encore plus douloureux pour les enfants, de plus en plus nerveux et violents. Les instituteurs témoignent de la difficulté des élèves à assimiler les leçons. Les parents, des problèmes d'énurésie nocturne et de dépression. La plupart des citoyens vivent dans la peur de voir se renouveler à tout moment les bombardements aveugles et les crimes prémédités contre les populations civiles. L'impact de la fermeture des points de passage avec l'Etat hébreu et du blocus des autorités israéliennes sur les produits de base est énorme sur le quotidien des Ghazaouis. L'interdiction de faire entrer du ciment et des matériaux de construction depuis la victoire du Hamas en juin 2007 avait déjà freiné les projets de construction. La situation aujourd'hui a empiré puisque pas moins de 20 000 habitations, en plus de tous les édifices officiels, comme le Conseil législatif, les différents ministères, les casernes, les postes de police, certaines écoles, certains centres de santé… ont besoin d'être reconstruits. Les milliers de familles qui travaillent dans le secteur du bâtiment, un des plus pourvoyeurs d'emplois dans la bande de Ghaza, se retrouvent sans revenu. D'autres secteurs comme celui de la santé, de la production du courant électrique ou encore de la petite industrie souffrent autant. Lorsque les autorités israéliennes interdisent le passage de carburant, les coupures de courant deviennent plus fréquentes, le réseau des transports se paralyse, les stations de pompage des eaux usées et de l'eau courante s'interrompent. Plus de 90% des usines de la bande de Ghaza sont à l'arrêt. L'armée israélienne a démoli toutes les infrastructures industrielles dans les zones qu'elle a occupées. Plus de 80% de la population vivent en dessous du seuil de pauvreté – plus de la moitié des Ghazaouis reçoivent l'aide humanitaire de l'UNRWA, l'Agence onusienne pour l'aide aux réfugiés palestiniens – et le chômage atteint un taux record de 70%. Quant aux salariés, Israël les étouffe en privant les banques de la bande de Ghaza d'argent liquide. Le citoyen palestinien ne peut prétendre quitter le territoire pour affaire, soins, études… car le terminal de Rafah, entre l'Egypte et la bande de Ghaza, la seule portière vers l'étranger reste fermé, les autorités égyptiennes refusant d'ouvrir, sauf pour de rares cas, le terminal en l'absence de représentants de l'Autorité palestinienne et d'observateurs européens.