A l'initiative de Zineb Laouedj, tous les romans de l'écrivain sont désormais disponibles en un volume. La sympathique maison d'édition Al Fadha Al Hour (espace libre), dirigée par la poétesse Zineb Laouedj et qui a déjà à son actif quelques petites perçées éditoriales bien honorables, vient de réediter, en un seul volume, l'ensemble des œuvres romanesques de Abdelhamid Benhaddouga (1925-1996). Cette anthologie comprend donc Le Vent du Sud, La fin d'hier, La mise à nu, Djazia et les derviches, Je rêve d'un monde nouveau. De prime abord, on ne peut que se féliciter de voir un produit littéraire algérien porté à ce haut niveau de technicité éditoriale. Le romancier, Waciny Laaredj, dans son introduction, met l'accent essentiellement sur la nécessité de mémoriser, par le truchement de l'édition, les œuvres d'auteurs algériens et de dépasser ainsi la phase de l'oralité qui aura prévalu dans le monde de la culture algérienne. Ainsi donc, étudiants préparant des mémoires de licence, des magistères ou des thèses de doctorats, auront ainsi la possibilité de mener leurs recherches en post-graduation en toute quiétude. Cette réédition des œuvres romanesques complètes de Abdelhamid Benhaddouga, il faut le dire encore, vient à point nommé, d'autant qu'un certain oubli, volontaire ou involontaire à l'égard de ce grand initiateur de l'expression littéraire moderne algérienne semble s'imposer dans le paysage littéraire. Si l'on excepte le colloque international sur l'œuvre de Benhaddouga, qui se tient annuellement en principe dans la ville de Bordj Bou Arréridj, force est de constater que la Radio algérienne ne diffuse plus ses pièces radiophoniques qui avaient constitué un pan important de son œuvre et gagné l'adhésion de nombreux auditeurs. La télévision, quant à elle, se détourne des films tirès de ses œuvres, et tout principalement, Le vent du Sud. Et Waciny de s'interroger avec une touche d'amertume : « Que manque-t-il à notre pays pour lancer une collection semblable à celle de La Pleiade, en France ? » En cela, il se fait en quelque sorte l'écho de Kateb Yacine qui exhortait les autorités du pays, au beau milieu des années soixante-dix, à le « nationaliser » pour ainsi dire, afin de mettre ses œuvres à la portée des lecteurs algériens et ce, sans attendre une autorisation préalable de ses éditeurs français. A l'invitation d'un ami qui voulait connaître exactement les grandes qualités humaines et littéraires de Behaddouga, je n'hésitais pas à qualifier celui-ci de « gentleman de la langue arabe en Algérie ». Il se trouve, aujourd'hui, que les romans de ce véritable gentleman ont bel et bien été piratés par certaines maisons d'éditions du Moyen-Orient. Zineb Laouedj vient donc d'accomplir un travail honorable en rééditant ses cinq romans, coupant ainsi la route, espérons-le, à tout acte de piratage éditorial. Souhaitons encore que ce travail se poursuive par la réédition, en un seul volume, de ces mêmes romans, dans leur traduction vers la langue française réalisée par le professeur Marcel Bois, grand connaisseur de l'œuvre de Benhaddouga et ami de l'auteur.