De quoi sera faite la nouvelle stratégie américaine en Afghanistan promise par le président américain juste après son élection le 4 novembre dernier ? Finis, semble-t-il, les discours, et place au changement. Un bien grand concept que l'on se garde d'expliciter, même si des spécialistes n'hésitent pas à parler tout simplement de doctrine, avec ses éléments collatéraux comme la guerre au Pakistan, le rapprochement avec des pays voisins jusque-là impensable, comme l'Iran avec lequel Washington a échangé des gestes fort significatifs comme la libération, par Téhéran, de la journaliste américano-iranienne. Cela annonce effectivement, au moins, un certain dégel, mais le monde, puisque cela lui a été suggéré, attend un vrai changement. Que préparent les Américains et qui en est concerné, et de quelle manière ? Pour l'heure, le changement concerne l'Afghanistan, mais lequel, puisque le premier à être annoncé concerne l'élément humain ? Le secrétaire américain à la Défense, Robert Gates, vient, en effet, d'annoncer le remplacement, moins d'un an après sa prise de fonction du plus haut gradé américain en Afghanistan, estimant que la situation dans la région exigeait une « nouvelle approche ». Certains relativisent toutefois ce changement, en parlant de limogeage après une série d'erreurs et d'incidents meurtriers, qui nuisent gravement à la stratégie que Washington envisage de déployer en Afghanistan. « Notre mission, là-bas, exige une nouvelle réflexion et une nouvelle approche de la part de nos responsables militaires », a déclaré M. Gates en annonçant le remplacement du commandant des forces américaines dans le pays, le général David McKiernan, en poste depuis juin 2008. M. Gates a choisi, pour occuper ce poste particulièrement sensible, le général Stanley McChrystal, actuel directeur de l'état-major interarmées. Celui-ci héritera d'une situation tendue à quelques semaines de l'élection présidentielle afghane du 20 août, alors que les violences des insurgés ont redoublé d'intensité depuis deux ans. M. Gates a expliqué que ce changement à la tête des forces américaines en Afghanistan s'inscrivait dans le cadre de la nouvelle stratégie dans la région, décidée par le président américain, Barack Obama. « Aujourd'hui, nous avons une nouvelle politique mise en place par notre nouveau président. Nous avons une nouvelle stratégie, une nouvelle mission et un nouvel ambassadeur (le général Karl Eikenberry, ndlr) », a déclaré M. Gates. « Je crois qu'un nouveau commandement militaire était également nécessaire. » M. Obama a réorienté la priorité militaire des Etats-Unis de l'Irak vers l'Afghanistan, où, d'ici à la fin de l'année, le contingent américain devrait être porté à 68 000 hommes. Ce nouveau dispositif met également l'accent sur le rôle des forces spéciales pour lutter contre les talibans, un rôle qui sied davantage à M. McChrystal, ancien commandant des opérations spéciales, qu'à M. McKiernan, dont l'expérience repose d'abord sur des conflits conventionnels. Diplômé de la prestigieuse école militaire de West Point, Stanley McChrystal connaît le terrain pour avoir dirigé la cellule spéciale qui a commandé l'engagement militaire américain en Afghanistan fin 2001. Le général McKiernan avait estimé que le conflit se trouvait dans une « impasse » face à la montée en puissance des talibans, particulièrement dans le sud de l'Afghanistan. M. Gates a expliqué que la décision de remplacer M. McKiernan avait reçu l'aval de M. Obama, et qu'il l'avait prise après avoir consulté le commandant des forces américaines dans la région, le général David Petraeus et le chef d'état-major interarmées américain, l'amiral Michael Mullen. Le secrétaire à la Défense prévoit, en outre, de renforcer la mission américaine en Afghanistan en nommant le général David Rodriguez, qui servira sous les ordres du général Mc Chrystal. Bien entendu, un tel mouvement de personnels militaires ne saurait expliquer à lui tout seul la nouvelle stratégie US dans ce pays. Qu'en sera-t-il alors ? d'autant que la guerre s'étend au pays voisin avec une forte pression des Etats-Unis sur les autorités pakistanaises résolues, quant à elles, à éliminer l'insurrection comme elles l'affirment.