Ces «touristes», d'une autre nature, viennent encore une fois pour pratiquer leur sport favori, la chasse à l'outarde houbara et la gazelle dorcas. Ils sont venus décimer des espèces d'animaux protégées par la loi (décret n°83-509 du 20 août 1983, arrêté du 17 janvier 1995, décret exécutif n°06-05 du 15 juillet 2006). Qui les a autorisés à y atterrir ? Qui leur a donné carte blanche pour chasser ces animaux pourtant protégés par la loi ? Ces braconniers ont-ils un permis de tuer, sur le territoire algérien, des espèces animales en voie d'extinction ? Les autorités affichent un silence inexpliqué.La présence de ces émirs braconniers du Golfe ne semble préoccuper ,ni gêner personne parmi ceux qui sont censés faire appliquer la loi sur la protection de ces espèces animales. Sinon, comment expliquer le fait que ces dignitaires du Golfe, équipés d'un matériel ultra-sophistiqué, débarquent à Béchar par avion spécial pour s'adonner par la suite à leur sale besogne sans que personne lève le doigt ? Ironie du sort, toutes les institutions que nous avions contactées hier à ce propos nous ont distillé presque la même réponse : «Nous ne sommes pas au courant.» «Je ne peux rien vous dire, je n'ai aucune information à ce propos, ça me dépasse», nous dit gentiment l'assistante de Mme Bessa, la chargée de la communication de la présidence de la République. Notre interlocutrice, avant de nous quitter, nous a pourtant promis de nous rappeler, mais notre attente était restée vaine. Au ministère de l'Aménagement du territoire de l'Environnement et du Tourisme, c'est bouche cousue. «Je ne suis pas au courant», dira Ahmed Bousdjira, chargé de l'activité touristique et aussi chargé de la chasse touristique. Pourtant, pour revenir au décret exécutif de juillet 2006, celui-ci autorise l'exercice de la chasse touristique, mais exclusivement par l'intermédiaire d'agences de tourisme et de voyages agréées et éligibles à organiser cette activité après autorisation du ministère chargé de la chasse sur la base d'un cahier des charges. Selon le même décret, les agences de voyages devraient disposer d'un «territoire de chasse amodié auprès de l'administration chargée des forêts et/ou loué auprès de particuliers conformément à la législation». Quant au chasseur, il devra avoir, selon cette législation, un permis de chasse validé par le wali territorialement compétent, une licence de chasser particulière à la chasse touristique, des assurances prévues par la législation et, bien sûr, des autorisations en matière d'armes, de munitions et d'autres moyens de chasse. Le décret exécutif précise même dans son chapitre II article 9 que «les agences de tourisme et de voyages peuvent faire appel à des établissements cynégétiques pour la prise en charge des repeuplements et des travaux d'aménagement cynégétiques dans les territoires amodiés ou loués». On se demande alors pourquoi le ministère de l'Aménagement du territoire, de l'Environnement et du Tourisme ne dispose d'aucune information sur ces touristes braconniers. Cela leur échappe aussi, sachant que le ministère de l'Agriculture ne dispose pas lui non plus d'informations sur cette activité des émirs du Golfe ? En attendant, ces chasseurs demeurent impunis, malgré tout un arsenal juridique qui protège ces espèces animales. La présence de l'outarde en Algérie se fait rare, y compris dans la zone prédésertique de l'Atlas saharien où elle était bien présente. La chasse des espèces menacées est officiellement interdite depuis 1972 en Algérie. C'est pourquoi, les pouvoirs publics doivent agir pour les protéger comme le stipulent la loi algérienne et les conventions internationales. A défaut de mettre fin au braconnage, peut-on faire entendre raison aux braconniers pour qu'ils acceptent de respecter un code spécial de la chasse qui permette de sauvegarder l'espèce ?