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Trafic de Corail
38 kg saisis
Publié dans El Watan le 02 - 02 - 2005

Les éléments de la Gendarmerie nationale de la brigade d'El Kala (El Tarf), munis d'un ordre de perquisition, se sont présentés récemment au domicile de M. R. commerçant à El Kala, âgé de 38 ans, pour y découvrir, entreposés, 38 kg de corail d'une valeur de 1,9 million de dinars.
La fébrilité, voire l'agitation qui a gagné les gendarmes et le déplacement de hauts gradés à El Kala impliquent que, pour les besoins de l'enquête, l'information communiquée à la presse a été quelque peu vidée de sa substance. En fait, le trafic de ce produit très convoité hors de nos frontières (Italie, Tunisie, Arabie Saoudite, Koweït), s'étale à l'ensemble de la corniche de l'est de Jijel à El Kala via Annaba. Cette énième affaire de trafic de corail, déclenchée à partir de déclarations d'un informateur, intervient après plusieurs autres sur lesquelles avaient enquêté les brigades de gendarmerie de Skikda, de Annaba et d'El Tarf. C'est à partir de la brigade maritime de Annaba que l'enquête allait s'accélérer à partir du début du mois d'avril 2004. A l'origine, la découverte de 2 chaloupes munies d'équipements de haute technologie pour la cueillette du corail et abandonnées en haute mer par leurs occupants. Profitant de la nuit, ces derniers avaient réussi à s'échapper dans un hors-bord à moteur silencieux. Ce n'était que partie remise. Durant la première quinzaine du mois de décembre 2004, après une enquête de plusieurs jours qui leur avait permis d'identifier les trafiquants, les gendarmes s'étaient postés en embuscade. Ils mirent la main sur 120 kg de corail et les équipements nécessaires pour la plongée sous-marine. Bien dissimulée dans une voiture touristique dans laquelle avaient pris place 4 individus dont 2 Tunisiens, cette quantité avait été découverte à la tombée de la nuit sur la route menant vers la frontière tunisienne située à quelques dizaines de kilomètres. A partir de ces deux importantes prises, les enquêteurs avaient tenté de poursuivre leurs investigations. Après de minutieuses recherches, ils avaient réussi à remonter la filière avant d'être stoppés. En effet, alertés par on ne sait quelle source, les membres du réseau mettront leurs activités en veilleuse durant plusieurs mois. Sous leur impulsion, El Kala s'était transformée en capitale africaine du trafic de corail. Elle représente également un point de chute où l'on retrouve des politiciens, des personnalités proches du pouvoir, des bénéficiaires de concession maritime domaniale pour l'exploitation des ressources corallifères, des exploitants, des propriétaires ou commandants de navire corailleur, des plongeurs algériens, des étrangers... Bien que les gendarmes aient mis le sceau de la stricte confidentialité sur cette dernière affaire en la limitant à M. R. qui, placé sous mandat de dépôt, ne serait rien d'autre qu'un simple interrupteur, nos sources affirment que cette interpellation en annonce beaucoup d'autres dans les prochaines semaines. Selon eux, le dossier corail est désormais assimilé à une affaire d'Etat par ceux désignés à son traitement. Les mêmes sources ont souligné que cette dernière prise de 38 kg de corail n'est rien comparativement à plus d'une tonne que les trafiquants ont réussi à cueillir ces derniers mois sur les côtes kaloises. « Je ne peux pas dire plus sans risquer de gros problèmes. Ces gens sont très puissants. Ils ont leurs entrées dans toutes les institutions y compris celles qualifiées d'hermétiques. Il faut vous rendre à Tabarka, à Sousse et à Djerba en Tunisie pour situer plus ou moins l'ampleur du trafic », a affirmé un ancien plongeur professionnel dans la région d'El Kala ayant requis l'anonymat. Le même sentiment de crainte est relevé dans les propos d'un père de famille au chômage dont le quotidien est intimement lié au trafic du corail pour avoir travaillé durant plusieurs années au contact de corailleurs italiens. « Les autorités algériennes ne font même pas l'effort de s'interroger pourquoi la ville italienne Torre del Greco, proche de Naples la capitale mondiale du corail est très prisée par une catégorie de citoyens algériens. Elles ne s'inquiètent pas aussi de cette soudaine richesse qu'affichent avec ostentation certains qui n'arrivaient même pas à se payer une cigarette il y a à peine une année », s'est-il limité de dire tout en se gardant de dévoiler son identité. Du côté de la gendarmerie, le black-out est total sur ce qui apparaît être la première grosse affaire d'importance internationale de ce début d'année 2005. Des indiscrétions recueillies auprès de différents services de sécurité font état d'une grosse prise et de la certitude que M. R. le « petit commerçant » est en fait, une des pièces de l'engrenage du large réseau de trafic de corail. Ce dernier sévirait dans le domaine de l'exploitation du corail entre les côtes de Jijel, de Skikda, de Annaba et d'El Tarf. Ses ramifications s'étendent jusqu'en Italie via la Tunisie, ce dernier pays étant la plaque tournante de toutes les transactions. Censée être interdite sur quinze années depuis le début des années 2000, l'exploitation des ressources coralliaires sur les côtes algériennes a, au contraire, pris de l'ampleur. Cette situation est la conséquence de l'absence de moyens au diapason de ceux, de haute technologie, en possession des trafiquants pour leurs activités néfastes. Elle semble être le principal handicap auquel les services de sécurité, chargés de la surveillance de nos côtés, sont confrontés.

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