L'immigration clandestine commence à susciter de vives inquiétudes chez les officiels algériens. Les rencontres et les débats sur la question se multiplient pour tenter de trouver des solutions à même d'aider à endiguer ce phénomène. Cette inquiétude est clairement mise en relief à travers les déclarations des services de sécurité lors du séminaire organisé depuis lundi dernier par la commission défense de l'Assemblée populaire nationale (APN). L'on y a reconnu que l'ampleur prise actuellement par les flux migratoires vers notre pays est imputable à l'existence de réseaux de passeurs spécialisés. Ce constat a également été relevé dans le rapport récemment déposé par notre pays devant les instances du Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles, siégeant pour le compte du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme. Le démantèlement de ces réseaux de passeurs demeure pour l'Algérie l'un des moyens les mieux appropriés pour une meilleure maîtrise et le contrôle des flux migratoires irréguliers. C'est pourquoi, dans le même document, elle affirme attacher une grande importance à la coopération régionale dans le domaine de la migration. Pour preuve, elle s'est liée à ses deux principaux pays voisins du Sud – le Mali et le Niger – par des accords de coopération frontalière. Ces accords prévoient la coopération en matière de lutte contre l'immigration clandestine, à travers l'échange d'informations et le démantèlement des réseaux de passeurs. Rêves et réalités Ces derniers assurent le passage par nos frontières pour une moyenne annuelle de 7000 migrants clandestins. Ces migrants clandestins travaillent dans le secteur informel, soit pour s'installer durablement, soit pour constituer un certain pécule dans le but de tenter l'émigration vers l'Europe. Cette dernière destination demeure le rêve de plusieurs milliers de migrants subsahariens pour qui la mer demeure la seule voie migratoire, vu la position géostratégique de l'Algérie au carrefour de l'Afrique, de l'Europe et de la Méditerranée. En effet, indique le rapport, le renforcement de la surveillance au niveau de la route migratoire des enclaves de Ceuta et Melilla, longtemps utilisées pour rejoindre l'Europe, a détourné les immigrants clandestins vers d'autres routes migratoires. Aussi, le renforcement de la coopération entre le Maroc et l'Espagne en matière de lutte contre l'immigration clandestine a amené les flux migratoires clandestins à recourir à d'autres voies d'acheminement, notamment l'archipel des îles Canaries, où ils arrivent depuis le Sénégal et d'autres pays de l'Afrique de l'Ouest. Les candidats, en majorité des jeunes de moins de 30 ans, payent entre 100 000 et 200 000 DA un passeur qui, lui, se charge de faire construire une embarcation artisanale et de trouver le « navigateur ». Les officiels algériens ont aussi fait savoir à leurs interlocuteurs onusiens que les traversées s'effectuent généralement de nuit par groupe de 10 à 12 personnes. Suivant les conditions météorologiques et l'état des réserves de carburant, certaines parviennent à atteindre la Sardaigne, Lampedusa (Italie) ou les côtes espagnoles alors que d'autres sont interceptées à proximité de la côte par les unités de la marine italienne ou espagnole. Par ailleurs, la connexion de ces flux migratoires irréguliers avec diverses formes d'activités criminelles organisées est aujourd'hui avérée, a fait savoir un officier supérieur de la Gendarmerie nationale lors du séminaire de l'APN. En la matière, l'Etat algérien est considéré comme bon visionnaire du fait de sa ratification en février 2002 de la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée en novembre 2000. Elle est également partie depuis le 9 novembre 2003 aux deux protocoles internationaux additionnels à cette convention. Ces deux protocoles se rapportent respectivement au trafic illicite de migrants par terre, air et mer, et à la prévention et la répression de la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants.