Croustillants et dorés, gonflés, gras, luisants, salés ou sucrés, ces spécialités tunisiennes que l'on appelle les f'tair, sfenj ou khefaf ont de moins en moins de succès. Tournée auprès des khfafji d'Alger. « Je crains que cette tradition ne disparaisse et que les khfafjia ne restent qu'un souvenir qui a marqué des générations d'Algériens », déplore El Hadi Tounsi, quinquagénaire de la rue de Tripoli, Hussein Dey, destiné à exercer le métier que les Tunisiens perpétuent dans le monde, dans la pure tradition familiale des années 1940. En effet, bon nombre de Tunisiens installés en Algérie depuis la période coloniale ont ouvert des locaux faisant office de cuisine. On trouve une liste de spécialités maghrébines et orientales, préparées dans ces petits locaux, peints de motifs traditionnels et ornés de faïence, pour la plupart en jaune et vert. « Je n'ai pas voulu changer de faïence, de peinture ni de matériel de travail pour garder l'aspect ancien et original qui attire encore les plus de 50 ans ! », confie Omairi, khfafji tunisien qui a pris la relève de son père et de son grand-père dans ce domaine. « Ce métier est un héritage dans notre famille comme chez tous les Tunisiens. Les recettes des différents gâteaux qu'on propose sont transmises de génération en génération. » La confection de beignets appelés f'taier ainsi que plusieurs autres gâteaux (makrout El Kiraouane, zlabia,) sont les spécialités des habitants de Ghomrassen, ville tunisienne. Ce métier de ftayri est pratiqué depuis des siècles à travers la Tunisie, voire dans le monde entier. Même les célèbres gâteaux au miel de Béja (zlabia) ont été introduits et fabriqués dans la ville par les habitants originaires de Ghomrassen qui y ont ajouté des spécificités et des produits de la ville de Béja, tels que smen, pour en faire les beignets les plus célèbres de Tunisie. « Nous somme à Hydra, place El Qods, depuis 1963. Nous avons une clientèle fidèle qui revient fréquemment, mais j'avoue que la demande a diminué ces dernières années car le croissant et la pizza ont volé la vedette au khefaf et au makrout », affirme Numri, un jeune Tunisien, petits-fils du propriétaire. Le manque de clients et la rentabilité peu séduisante ont poussé certains khefafjia à se convertir en fast-food ou magasin de prêt-à-porter, ou à baisser rideau et à s'envoler vers d'autres cieux, à l'instar du khefafji de la rue Ali Khodja d'El Biar. « J'ai bien l'intention de changer d'activité même si cela va à l'encontre des projets de ma famille qui vit de ce commerce depuis 1930 », se désole Abdelaziz, 25ans, aux Trois Horloges de Bab El Oued. Et d'ajouter : « Les gens demandent des petites quantités de khefafs car, à mon avis, ils sont plus conscients de l'effet pernicieux des sucreries et des matières grasses sur la santé. En revanche, les recettes les plus fructueuses, on les récolte au mois de Ramadhan. » Côté prix, les coûts diffèrent d'un quartier à un autre. Le khefaf que l'on achète 10 DA à Bab El Oued, grimpe jusqu'à 15 DA à Hydra. Même logique pour la zlabia dont le kilogramme est de 160 DA et 200 DA dans les deux quartiers respectifs.