Le parquet de Boumerdès vient d'ouvrir une information judiciaire sur les circonstances dans lesquelles le séisme du 21 mai 2003 a occasionné autant de dégâts dans le secteur du bâtiment, a-t-on appris de source judiciaire. Dans ce cadre, des commissions rogatoires ont été délivrées à la Gendarmerie nationale pour auditionner les promoteurs immobiliers publics et privés concernés par le secteur de la construction à Boumerdès et à Alger. Une enquête préliminaire avait été ouverte par la Gendarmerie nationale, juste après le tremblement de terre, et ce, sur instruction du président de la République, qui a été interpellé par les sinistrés à propos de la facilité avec laquelle les édifices publics et privés se sont écroulés dès les premières secousses. Des matériaux de construction ne répondant pas aux normes de la construction, des étages ajoutés à la dernière minute et des structures de base non conformes au principe parasismique. Autant de failles qui n'ont pas permis aux immeubles et bâtisses de résister au séisme du 21 mai 2003, alors que de nombreux édifices datant de l'époque coloniale ou construits avec rigueur n'ont subi que de légers dégâts. Devant cette situation, une enquête judiciaire a été ouverte par la gendarmerie, qui a entendu au moins une cinquantaine de promoteurs publics et privés ainsi que des experts du bâtiment et de la construction pour confronter les dires des uns et des autres. Cette enquête aurait, selon des sources judiciaires, abouti à des « négligences graves ayant entraîné mort d'hommes et destruction des biens de la collectivité ». Ce rapport a été donc déposé sur le bureau du procureur général près la cour de Boumerdès. Il a fallu attendre plus d'une année pour que ce dernier rouvre le dossier et délivre des commissions rogatoires à la gendarmerie pour compléter l'information judiciaire. L'instruction est donc ouverte et il est fort probable que des décisions soient prises à l'issue de cette enquête. D'après nos interlocuteurs, ce dossier « est traité avec une grande fermeté par le premier magistrat du pays qui le suit de très près comme c'est le cas pour l'affaire du naufrage du Béchar, qui avait causé la mort de 18 marins de la CNAN. La gendarmerie est en train de finaliser les dernières auditions et il n'est pas exclu que dans les jours qui viennent le parquet décide de convoquer les mis en cause... ». L'opinion publique, longtemps habituée à l'impunité, sera à coup sûr étonnée de constater que pour la première fois, la justice algérienne se saisit d'une affaire où des promoteurs privés et publics ont été la cause de la perte de vies humaines, du fait du non-respect des normes de construction. Un précédent qui, à l'avenir, donnera à réfléchir aux escrocs de tous genres.