La chambre d'accusation près la cour de Blida a reporté l'examen du dossier Khalifa pour le 19 juin, à la demande du collectif de la défense des prévenus, a-t-on appris auprès de ce dernier. Selon les avocats, les délais de l'arrêt de renvoi « ont été trop courts » pour leur permettre de préparer leurs moyens de défense et plaider devant la chambre d'accusation. En matière criminelle, le juge renvoie toute la procédure d'instruction devant le procureur général, qui saisit la chambre d'accusation, composée d'un président et de deux conseillers, pour la réexaminer. « Au cours de l'audience, les avocats peuvent soit transmettre un mémorandum, sans plaider, ou faire les deux en même temps, alors que le représentant du parquet général, également représenté, fait son réquisitoire. Une sorte d'un procès axé essentiellement sur les qualifications des faits des 124 prévenus et accusés », a expliqué un avocat. La chambre d'accusation aura donc à revoir totalement la qualification des faits reprochés, à savoir association de malfaiteurs, dilapidation des deniers publics, abus de biens sociaux, corruption et complicité de corruption. La majorité des avocats récuse surtout la qualification d'association de malfaiteurs, seule accusation qui fait basculer l'affaire de la correctionnelle à la criminelle et dont les peines encourues pourraient aller jusqu'à la perpétuité. A ce stade de la procédure, une des trois options est à retenir par la chambre d'accusation. Soit la confirmation de la qualification des faits et le renvoi du dossier devant le tribunal criminel, soit leur infirmation et le renvoi devant le tribunal correctionnel, ou encore le renvoi une seconde fois devant le juge d'instruction pour complément d'information. Dans ce dernier cas, la machine judiciaire est remise à zéro et l'instruction pourrait durer encore des mois. Il y a quelques jours, une source proche du parquet de Blida avait affirmé que l'affaire Khalifa aura lieu vers la fin de la session criminelle en cours à Blida. Il a expliqué que, vu la complexité et l'importance du dossier, il a été décidé de le scinder en deux. Le premier volet est lié à la gestion des caisses d'El Khalifa Bank et des dépôts des fonds des sociétés publiques, pour lequel actuellement 124 personnes sont inculpées parmi lesquelles cinq sont en détention provisoire. Cette partie du dossier a été instruite avec l'aide d'experts en finance, mais également des commissions rogatoires délivrées à la gendarmerie nationale pour répondre à certaines questions précises et détaillées du dossier. « Il est probable que le procès soit programmé vers la fin du mois de juin ou le début du mois de juillet », a déclaré notre source. Parmi les inculpés, a ajouté notre interlocuteur, une quarantaine de PDG d'entreprises publiques, notamment celles du secteur du bâtiment et de la construction, ainsi que les patrons des caisses sociales qui sont poursuivis pour avoir déposé les fonds de leurs sociétés dans les comptes d'El Khalifa Bank, en « contrepartie de privilèges personnels ». Concernant les autres dossiers relatifs au transfert illicite de devises, l'importation des deux stations de dessalement d'eau de mer, l'achat des actions de la société FIBA, Khalifa TV et Khalifa Airways, la source judiciaire a affirmé que l'instruction se poursuit toujours. Les résultats des commissions rogatoires délivrées aux justices émiratie, française, britannique et libanaise « ont été probants et ont permis d'apporter des réponses à de nombreuses questions ». Pour ce dossier, a-t-elle ajouté, au moins une centaine de personnes ont été déjà entendues parmi lesquelles cinq ministres, dont deux en activité. « Entendues en tant que témoins, beaucoup de par leur statut bénéficient du principe du privilège de juridiction. Leur dossier sera remis à la Cour suprême, qui désignera à son tour le juge d'instruction qui se chargera de leur cas. Leur procès risque de prendre beaucoup de temps », a expliqué notre interlocuteur. Il a ajouté qu'en plus de ces hauts responsables, d'autres, notamment des directeurs généraux des administrations et d'entreprises publiques, sont également concernés, mais leur cas n'a pas été tranché à ce jour. « De lourdes charges pèsent sur eux, mais à ce stade l'instruction n'a pas encore finalisé l'ensemble du dossier », a-t-on précisé.