On a cette étrange impression que nos trois chaînes de télévision — ENTV, Canal Algérie et A3 — ont épuisé leurs programmes dits « spécifiques » plus vite que prévu. La dernière semaine de Ramadhan a paru, en effet, bien vide et d'aucuns diront qu'il n'y a eu, passé l'heure du ftour, « plus rien d'intéressant à voir » depuis que les têtes d'affiche de la grille, en l'occurence les sitcoms et les feuilletons de la soirée, ont terminé brutalement leur course. La production paraissait pourtant suffisamment prolifique cette année pour tenir la route jusqu'au bout, surtout que la nouveauté était de concocter pour chaque chaîne un programme singularisé qui ne laissait pas tellement le choix au téléspectateur d'aller voir ce qui se passait ailleurs. Le retour à l'ancien système, qui consiste à faire du remplissage à partir d'une même source d'alimentation, prouve que notre chère télé, qu'on croyait capable de relever un défi aussi élémentaire, est à bout de souffle. Comparée aux différentes chaînes marocaines qui s'auto-suffisent avec leurs propres productions, notamment les émissions de divertissement, et qui semblent bien résister aux aléas d'une programmation à long terme, nos télés font grise mine. Plus grave, elles font presque dans le bricolage en ne sachant pas trop comment, à quelques encablures de la fin du Ramadhan, gérer le timing d'une chaîne par rapport à une autre. Peut-on nous expliquer, par exemple, pourquoi Djemaï Family qui passait simultanément sur la chaîne terrestre et sur Canal Algérie, a remis ses compteurs à zéro sur A3, bénéficiant donc de la totale point de vue audience alors que Souk Lakhdar ; qui a fait les beaux jours de cette dernière chaîne, n'a pas eu, une fois son dernier épisode consommé, le même privilège de faire carrière ailleurs, au grand dam de ceux qui n'avaient pas eu la possibilité de le suivre. Est-ce le critère de la qualité ou celui de l'excellence du produit qui a prévalu ? Est-ce une question de clause dans le contrat qui impose une seule diffusion ? Ou est-ce tout simplement de l'improvisation, l'important pour le service de programmation étant de faire tourner le manège sans trop se soucier du contenu puisque le même sort a été réservé aux feuilletons phares de la soirée qui ont connu des fortunes diverses. Mis à part Le Médaillon de Baya El Hachemi qui semble être le seul à remplir, sur A3, tout le mois de Ramadhan et peut-être au-delà, les trois autres à savoir Djourouh El Hayat, Darna Lakdima et Bine El Barah Ouel Youm ont eu un traitement inégal en matière de rediffusion. Alors que les deux derniers ont été carrément retirés du circuit, on a remis sur Canal Algérie le feuilleton de Amar Tribeche pour les besoins d'une « soudure » qui s'est faite particulièrement sentir compte tenu du fait que la chaîne destinée à l'émigration s'est vue attribuer le programme le moins consistant de la grille. Les déséquilibres en matière de programmation ont été flagrants et se ressentent à travers les émissions de substitution, comme Caméra Chorba, qui ont tout l'air d'être de simples « fourre-tout » qu'on impose au public. Quand Ana Khatini, l'émission pour rire de Mourad Khane, devient simultanément sur deux chaînes presque le clou de la soirée, on a une idée précise de la suite d'un programme qui, franchement, n'enthousiasme plus comme au début du mois de Ramadhan. Une fin donc pénible avec cette caméra cachée qui ronronne plus qu'elle ne distrait ou de cette Caméra Chorba copiée grossièrement sur Caméra Café qui fait fureur sur M6, sans avoir les ingrédients d'une émission intelligente, rythmée, où chaque mot prononcé est un maillon important de la chaîne du rire délirant. Celle-ci nous rappelle Chouchou et Soussou, l'an dernier, qui en voulant imiter Un gars, une fille, l'émission culte de France2, a tout simplement connu un ratage monumental. On n'a pas vu beaucoup, en ce Ramadhan, Hamid Achouri qui d'ordinaire occupe un petit espace télévisuel, mais à le voir gesticuler dans tous les sens dans cette nouvelle émission, jouant le père ignare avant la rupture du jêune, nous amène à penser que le comique respectable qu'il était se trouverait peut-être sur une mauvaise pente comparativement à ses compères Lakhdar Boukhers ou Salah Tagrout qui tiennent encore le haut du pavé. Il en de même, mais dans une proportion moins afligeante, pour Mustapha « Ghir Hak » qui nous a refilé du n'importe quoi cette année. Mais que faire lorsqu'on n'a rien d'autre à se mettre sous la dent, car il faut le dire, le reste du programme, fait d'émissions dites culturelles ou de téléfilms « historiques », n'a pas de quoi attirer les foules. A propos de culture, on espérait que la télévision nationale allait transmettre en direct, sur l'une des trois chaînes, le Festival de châabi abrité par le TNA pour nous faire découvrir les nouveaux talents de ce genre musical apprécié dans tout le pays, d'autant qu'il y a suffisament de vide à combler, mais non.Trèn ! Oualou ! Faut ravaler vos frustrations... A quoi donc sert une télé d'Etat qui est subventionnée par l'argent du contribuable si elle ne se met pas au service de la culture populaire ? Mais là est une autre question.