Coincée par la géographie, l'Algérie se tourne vers son histoire. Elle vient de demander à des laboratoires français de dater les gravures rupestres disséminées sur son territoire. Car contrairement à ce que l'on pense, l'art pariétal saharien n'est pas confiné dans une période précise, mais s'étale d'un âge de moins 10 000 ans jusqu'à il y a quelques siècles seulement, voire jusqu'à aujourd'hui si l'on intègre dans cet art les « vive Mouloudia », les « j'aime Atika » ou les graffitis des appelés de passage. La question de ces recherches recoupera certainement le « d'où viennent les Berbères ? », et s'ils ne viennent pas de Tizi Ouzou et de la cité des Genêts, il est un fait que de tout temps, les Algériens ou leurs ancêtres ont gravé les murs avec plus ou moins de raffinement dans l'exécution. Entre la finesse d'un bovidé et le basique « pouvoir assassin » ou « ulac smah », y a-t-il un lien ? Sont-ce les mêmes qui ont domestiqué le bœuf au néolithique pour finalement manger de l'âne haché aujourd'hui ? A l'évidence non, les premiers habitants du Sahara n'ont apparemment rien de commun avec ceux qui s'opposent aujourd'hui à l'injustice par des graffitis. Mais si la continuité historique est établie entre les chasseurs graveurs de la protohistoire et les chômeurs casseurs d'aujourd'hui, il y aura une leçon à prendre : la dégénérescence artistique d'une population est un fait et le génie n'est pas héréditaire. En tous les cas, et c'est la deuxième leçon du temps, les Français ont bien changé ; alors qu'il y a quelques décennies, ils enseignaient aux Algériens que leurs ancêtres étaient gaulois, ce sont eux qui les aident à dater leur histoire. Les Algériens ont aussi changé ; alors qu'il y a encore quelques décennies, ils faisaient démarrer leur histoire à l'arrivée des musulmans, ils regardent maintenant plus loin.Au-delà de la nappe de pétrole saharienne.