Ce matin, le «bêton» a bu mon sang. Le plafond froid a stoppé net L'ascension vertigineuse de ma cervelle. Un morceau de rêve, Une bribe de conversation, Quelques miettes d'amour, Une boule de douleur, Une poussière de bonheur et d'espoir, Des traces d'avenir. Ce matin, le «bêton» s'est repu de ma chair. Un reste de son corps, vêtu d'une robe du terroir, Une pour le plaisir du retour au pays, Une robe pour adoucir la nostalgie, Une robe pour ne pas oublier, La jeune fille : C'est ma robe ! La grand-mère : Peut-être la mienne ! Aïcha, l'enfant : Papa me l'a achetée. Ce matin, le «bêton» a piégé mon pied. Un pied qui a enduré toutes les affres, Qui a erré partout, Un pied en voyage, pour une maigre retraite enfin, Un pied qui tente l'aventure au-delà des mers, Un pied qui n'a pas entamé le grand parcours, Un pied incertain, prêt pour le départ. Ce matin, tapie dans la pénombre, la haine jubile. Buvant d'un trait un verre de sang. Ce matin, et tous les matins à venir, On ramasse, ici mon doigt, là son œil, Avec l'espoir de reconstituer, un corps déchiqueté.