Fidèle à sa philosophie, il ne laissait rien transparaître, se préoccupait des soucis des autres en les préservant des siens. Et pourtant il en avait des soucis, lui. La faucheuse le guettait depuis un moment mais sans jamais pouvoir l'avoir, alors qu'il était malade du coeur. Il s'est accroché à la vie jusqu'à ce sombre vendredi. Oui ! Tu es mort un Vendredi, le jour du seigneur, le jour des hommes intègres et valeureux. Tu as vécu en homme libre et intègre et tu es parti en brave. C'est ce même grand cœur pur et généreux qui t'as trahi, mais un cœur qui nous a permis de t'admirer, t'aimer et te chérir. J'aime à penser que tu es parti la conscience tranquille, et que tu reposes enfin dans cette terre bénie où tu demeures maintenant. Tu as fait tellement de bien autour de toi, apporté ton aide à tant de gens et donné tant de ta personne que tu manqueras douloureusement aux nécessiteux de cette ville, la tienne, Constantine. Tu as très tôt découvert que «Le véritable bien se trouve dans le repos de la conscience» et tu as fait de cette citation ton crédo. Je n'oublierai jamais le jour où tu as su par un heureux accident, alors que nous travaillions ensemble à El Watan, que j'étais le fils de ton vieil et intime ami de collège. Ton regard s'est figé pendant plusieurs minutes. Tu m'avais alors chaleureusement serré contre toi en répétant, ému et les larmes aux yeux : «Bon Dieu, tu es le fils de Hamoudi, Allah Yerhmou.» Depuis je t'ai aimé comme un père et respecté comme un ami, tu étais mon confident, tu m'as soutenu dans la douleur et tu as partagé mon bonheur. Ahmed, en écrivant ces quelques lignes je me rends compte qu'il est encore plus difficile d'accepter ta disparition et de me résoudre à ne plus te voir. Tu m'as peut-être aimé pour avoir trouvé un peu de mon père en moi, mais moi, je t'ai aimé pour avoir trouvé beaucoup de mon père en toi. Adieu le bon samaritain.