Les Algériens de la salle Harcha mènent un combat courageux, c'est leur droit. On n'est pas différents, on diverge sur la méthode à suivre pour la défense des libertés démocratiques, sinon tout nous rassemble.» Tel est le message qu'a voulu transmettre, hier à la salle Baaziz de Blida, le candidat libre, Ali Benflis, aux partis politiques qui appellent au boycott de l'élection présidentielle du 17 avril prochain et lui demandent de se retirer de la course. «Je ne vais pas me retirer parce qu'on va gagner», a-t-il martelé devant une foule compacte acquise à sa cause. L'ancien chef de gouvernement s'engage, en effet, à mettre en place un gouvernement d'union nationale, ouvert même à ceux qui ne sont pas d'accord avec lui. La première tâche sera, comme le plaide Ali Benflis depuis le lancement de la campagne électorale, l'élaboration d'une Constitution consensuelle avec la participation de tous les acteurs politiques. Dans un réquisitoire contre l'instabilité constitutionnelle que vit l'Algérie depuis son indépendance, le candidat, qui survole les quatre Lois fondamentales qu'a connues le pays, a fustigé la dernière d'un revers de phrase en demandant à l'assistance – qui était très nombreuse, la salle des sports de la ville des Roses était plein comme un œuf de cadres, de la classe moyenne et de jeunes – «de ne pas lui demander de parler de la cinquième tout simplement par respect pour l'histoire de l'Algérie, pour Krim Belkacem, Abane Ramdane et tous nos héros». «Vous voyez, eux aussi se sont mis à parler de Constitution consensuelle», fait remarquer Ali Benflis à ses partisans, avant de douter de leur sincérité : «Pourquoi ils ne l'ont pas fait durant les 15 années qu'ils ont passées au pouvoir ? Ils n'ont rien fait pendant trois mandats et ils viennent aujourd'hui demander de les prolonger de 5 autres années ?» «Ça suffit», peste le candidat, en soulignant encore une fois que «la gestion de l'Etat n'est pas un jeu ni une plaisanterie». Devant une assistance tout ouïe, en communion totale avec lui, l'orateur au don insoupçonnable de tribun a plaidé pour son projet de renouveau national avec la force des mots : «Si je suis élu le 17 avril, trois mois après, si je renie mes engagements, sortez dans la rue !» Ali Benflis a sorti hier un grand discours abordant tous les volets de son programme «de renouveau national», de l'école jusqu'au secteur de la justice qu'il promet de libérer, jusqu'aux prérogatives des élus locaux. «Je ne viendrai pas avec une Constitution sur mesure, on fera ensemble une Loi fondamentale pour l'Algérie.» «Libérer les magistrats, les élus locaux, les parlementaires et la presse, sortir de l'impasse que vit le pays, c'est ça l'Etat que je veux construire», plaide Ali Benflis, qui tire sur le gouvernement qui, selon lui, est devenu «un comité de soutien, les ministères aussi. N'est-ce pas là un début de privatisation de l'Etat ?» Le candidat fait un constat amer : «On est devenu la risée du monde !» Ali Benflis réitère à ses partisans que sa campagne électorale sera accomplie dans un respect total. «Je ne sais pas insulter et si on faisait une compétition en la matière, je serais le dernier de la classe», indique le candidat qui veut rassembler tous les Algériens. Et pour lui, celui qui veut rassembler – allusion faite au président-candidat – «doit veiller des nuits et travailler vingt heures par jour pour sortir le pays de la crise». «L'adoration n'est que pour Dieu», ajoute l'ancien chef de gouvernement, qui promet de mettre fin à «la justice de la nuit qui a permis la dilapidation des richesses du pays». Ali Benflis, qui considère que la prochaine élection est décisive pour l'avenir du pays, appelle à une réconciliation avec l'histoire de l'Algérie. Et ce n'est pas par hasard que Blida, une wilaya marginalisée, a été choisie pour rendre hommage à ses glorieux chouhada : les frères Brakni, Mustapha Chaker, Mustapha Chaalal et le défunt M'hammed Yazid. Le candidat a aussi plaidé la cause «des enseignants qui sont malmenés, je leur voue une totale considération». Il s'est adressé également à la jeunesse qui occupe une place importante dans son programme et envisage aussi d'instaurer une pension digne pour les retraités algériens. Ali Benflis fait une proposition inédite en promettant la reconnaissance, selon les règles admises dans les pays développés, d'un syndicat pour le corps de la police. Un syndicat, selon lui, qui ne fera pas de grèves mais défendra les droits moraux et matériels des policiers. Après Blida, l'ancien chef de gouvernement s'est rendu à Adrar où il devait animer un meeting au chef-lieu de wilaya.