Depuis les premières heures de la journée d'hier, le standard du journal a littéralement explosé. La dernière sortie publique de l'immense moudjahida Djamila Bouhired (lire notre article d'hier : « Le cri de colère de Djamila Bouhired ») a provoqué un véritable tollé au sein de l'opinion, suscitant les réactions les plus outrées et les plus solidaires de la part de nos lecteurs. En effet, tous les Algériens ont été choqués et scandalisés d'apprendre que l'icône de la Révolution algérienne, Djamila Bouhired, affronte la maladie dans une telle solitude et dans le mépris des institutions. Depuis les premières heures de la journée d'hier, le standard du journal a littéralement explosé. Simples citoyens, hauts responsables en poste ou à la retraite, personnalités du monde politique ou culturel, les Algériens ont tenu à témoigner par milliers et par millions leur entière solidarité avec l'héroïne de la Bataille d'Alger, condamnée à mort en 1957. Ainsi, la valeureuse moudjahida ne s'est pas trompée en s'adressant directement à « son » peuple pour l'interpeller sur son état de santé comme on se confie aux siens. « Je me trouve actuellement dans une situation critique. Les médecins m'ont conseillé trois interventions chirurgicales lourdes et coûteuses auxquelles je ne peux faire face : l'hospitalisation, les interventions chirurgicales, les soins, les médicaments et l'hébergement dans un hôtel ne peuvent pas être couverts par ma retraite et la petite pension de guerre. Aussi, je vous demande de m'aider, dans la mesure du possible », écrivait-elle dans une lettre ouverte aux Algériens. Réagissant avec une extraordinaire célérité, ceux-ci ont tout de suite répondu présents. Toute la journée, les appels fusaient en demandant avec insistance : « Qu'est-ce qu'on peut faire ? Comment peut-on aider ? », en nous exhortant à ouvrir rapidement un compte « Djamila Bouhired ». Dans le lot, de nombreux anciens maquisards qui végètent dans le dénuement le plus total, déplorent-ils, comme cet ancien combattant de 86 ans qui nous a appelé de Kabylie et qui ne perçoit, dit-il, aucune pension. C'est aussi tout le sens du coup de sang de Djamila Bouhired qui, même si elle se défend d'être le porte-parole des laissés-pour-compte de la guerre de Libération nationale, n'en a pas moins alerté l'opinion sur l'ingratitude dont l'Algérie indépendante s'est rendue coupable envers tant et tant de militants nationalistes qui se retrouvent sur la paille. « Si une reine comme Djamila Bouhired se retrouve dans un tel état d'abandon, c'est inquiétant pour notre pays », s'indigne une ancienne ministre, suffoquant de larmes d'émotion. Un autre lecteur, retraité, lui-même fils de moudjahid, s'est écrié : « Il faut que le président Bouteflika lui rende visite sans délai, et loin des caméras, pour s'enquérir de son état de santé. Il faut qu'il mette de toute urgence les moyens de l'Etat algérien à sa disposition et l'évacue dans un avion spécial. » Un autre a émis le souhait de faire visiter à son fils la maison de Djamila Bouhired, fût-ce de loin. Nous devons préciser au passage que Mme Bouhired habite, en vérité, dans un simple appartement encastré dans un immeuble, à Alger. Elle n'a ni villa ni palace… Les marques de sympathie ont donc été nombreuses et ferventes. A l'heure où nous mettons sous presse, elles continuent encore de « pleuvoir ». Le forum d'El Watan abonde de messages d'indignation. Un groupe de soutien a été crée sur Facebook sous le nom « Bouhired dans nos cœurs ». Certains ont même commencé à s'organiser pour lever des fonds en vue de prendre en charge l'intervention chirurgicale de Mme Bouhired à l'étranger. Le grand artiste-peintre Mustapha Boutadjine, qui a réalisé, rappelons-le, un magnifique portrait de l'illustre résistante, nous a contacté par mail pour nous faire cette proposition : « Je vous propose de mettre le portrait de Djamila Bouhired, ci-joint, aux enchères de sorte que le bénéfice intégral de la vente de ce tableau soit remis à notre héroïne internationale. » Une dame a proposé de vendre ses bijoux. Dans l'attente d'un geste du président Bouteflika, puissent ces ardents témoignages d'amour donner des forces à notre éternelle Djamila…