C'est une affaire banale», ose trancher dans un entretien accordé au site TSA Mohamed Tahar Hadjar, recteur de la Faculté d'Alger au sujet de l'affaire de la robe jugée «trop courte» qui a failli empêcher une étudiante de passer son examen de CAPA à la Faculté de droit d'Alger. Les faits remontent à la semaine dernière, lorsqu'une étudiante s'est vue refuser l'accès à l'université par un agent de sécurité, au fallacieux motif que la jupe portée par l'étudiante, accompagnée pourtant par son époux, n'était pas admise, scandaleuse, car manifestement non conforme aux «préceptes des agents de sécurité» ! Humiliée, la pauvre, qui a failli rater toute une année de sa carrière au cause de la «bêtise» d'un agent zélé, manifestement conforté par ses «doctours» responsables, était astreinte à courir se rhabiller dans le magasin d'à-côté pour rattraper l'épreuve. Ces mêmes agents qui ont brillé ces dernières années par leur caractère agressif envers les étudiants, ainsi que leur comportement qui frôle le harcèlement que certaines étudiantes ne cessent de dénoncer. «Son travail consiste à faire respecter le règlement intérieur de la Faculté», tente de justifier le recteur pour défendre l'agent de sécurité. Seulement voilà, le règlement intérieur ne précise dans aucun texte les mensurations, les modèles, les coupes, ainsi que les couleurs… en d'autres termes le code vestimentaire à respecter. La mini-jupe ou la midi n'a jamais été une tenue «indécente», bien au contraire, elle est classée dans le «business dress code». Approché, l'agent de sécurité se refuse à tout commentaire et la jeune dame se mure dans le silence, de peur de représailles. A en croire les témoignages de nombreuses Algériennes qui ont vécu dans les années 60' et 70', à l'école comme à l'université les jupes courtes étaient certes à la mode, mais la teneur intellectuelle et les polémiques à l'université ne tournaient pas autour des «chiffons». C'est donc au bon vouloir et à l'appréciation des agents de sécurité, apprentis couturiers, autoproclamés gardiens des mœurs que revient la décision, et d'instaurer bientôt des lois somptuaires à leur guise. Le recteur vient de commettre par ce geste tout le contraire de ce qu'on est supposé apprendre aux étudiants à la faculté de droit, à savoir la justice, les libertés et le respect des lois de la République. Un parti pris flagrant donc, et une affaire expédiée, instruite et jugée par notre recteur sans aucun respect des lois… surtout celle du droit à la présomption. Alors que le droit exige dans pareille situation que les parties soient entendues, puis différées en cas de besoin devant le conseil de discipline de la faculté pour statuer. Cette affaire renseigne sur des dérives signalées depuis peu sur l'ambiance qui règne au sein des nos universités. Des campagnes de «hijabisation» et de «kamissisation» sont par contre tolérées par des responsables de l'université et soutenues à grands renforts par des chaînes de télévision islamistes qui sont devenues un véritable danger pour la cohésion sociale voire, plus grave, à la sécurité de l'Etat. Le recteur, au lieu de prôner les valeurs de tolérance et de respect, et bannir toute forme de discrimination, se joint ainsi au «club des prédicateurs wahhabites, des gardiens de la bonne morale et des imams accessoirement» qui se sont répandus un peu partout dans nos administrations et lieux publics. Une islamisation rampante qui risque, au train où vont les choses, d'emporter tout sur son passage. L'Etat, dans son infinie inertie, ou bien par une volonté délibérée, se voit ainsi menacé dans ses fondements, voire même dans son existence.