Cette rencontre était organisée à l'occasion de la parution de l'ouvrage collectif intitulé Nous autres, éléments pour un manifeste de l'Algérie heureuse. Sorti en novembre 2016 aux éditions Chiheb International à l'occasion du 21e Sila, cet ouvrage se veut une somme d'éléments ou encore de profils variés s'interrogeant sur l'Algérie d'hier et d'aujourd'hui, à même d'essayer de profiler l'Algérie du futur et offrir «une pensée utile à la société algérienne, parce qu'elle lui permettra de sortir du doute et du désarroi, de combattre les archaïsmes et l'aliénation, de remettre en question la fatalité de la domination, d'exercer sa volonté et de maîtriser son destin», souligne Amine Khan au niveau de la quatrième couverture. Spécialisé en économie et sciences politiques, Amine Khan, qui est également connu en tant que poète, est revenu longuement sur la genèse de cet ouvrage. Il explique qu'il s'agit, en fait, d'une vieille idée, consistant à regrouper dans un champ intellectuel, extrême, éclaté «pour que nous approchons ensemble les questions qui préoccupent les Algériens, la société algérienne, les individus et dans toutes les dimensions de notre vie. Il était essentiel que cela ne soit pas un livre discours représentant une vision déjà établie et fermée des problèmes, mais par contre, un espace de liberté où des gens différents avec leurs approches puissent intervenir et du fait de la juxtaposition des points de vue différents indépendants, ils puissent former la base d'une discussion», dit-il. Amine Khan est allé vers quatorze auteurs aux profils multiples, dont la compétence est indiscutable dans le domaine. Il s'agit entre autres de Malika Rahal, Mouloud Boumghar, Farid Chaoui, Habib Tengour, Chawki Amari, Mouanis Bekari, Slim Benyacoub, Zineb Kobbi, Nassima Metahri, Nedjib Sidi Moussa. Ces derniers ont livré des textes rigoureux sur le plan de la pensée. L'orateur ajoute qu'il a contacté un certain nombre de personnes à qui il a fait lire son texte intitulé Nous autres de la voie étroite entre rêves et illusions, lequel ouvre cet ouvrage. Un texte qui commence par un constat sans concession. Certains ont d'emblée accepté de participer. D'autres ont remis cela à plus tard. Certains se sont engagés à le faire et n'ont pas été en mesure de le faire pour des raisons d'ordre pratique. Amin Khan souligne que cet ouvrage, certes, rassemble un certain nombre d'opinions et d'analyses, mais qui devrait être poursuivi. Car l'objectif assigné est d'essayer d'aborder une situation complexe, et ce, sous différents angles. «On ne peut pas, dit-il, se contenter d'un ouvrage comme celui-ci, aussi dense soit-il, mais par contre on a envie d'ajouter d'autres dimensions, d'autres analyses à cela.» A la question de savoir, «qui sont nous autres», cet ancien diplomate éclaire, en précisant, qu'il s'agit d'un concept à la fois très simple et assez subtile. Pour ce spécialiste, il s'agit de définir non pas une identité fermée, constituée, mais un projet d'appartenance. «C'est nous, Algériens, mais c'est aussi nous par notre appartenance aux dimensions différentes qui traversent notre société. Il y a les dimensions que nous connaissons et qui nous mettent en rapport avec les autres sociétés. En fait, quand j'ai écrit ce texte, j'ai pensé à la société algérienne, mais j'ai pensé que c'était au-delà une proposition qui doit avoir lieu dans d'autres sociétés, parce qu'il s'agit de problèmes fondamentaux qui structurent l'existence humaine. Ce n'est pas une désignation fermée. C'est un appel à la construction.» Pour Amin Khan, toute construction doit passer par la connaissance. «A ce stade, il n'y a pas d'a priori, ou encore, d'objectifs précis. Il y a, par contre, la volonté de développer, de valoriser, de mettre à jour la connaissance dont on a besoin pour prendre en charge nos problèmes et projets.» L'orateur a abordé, également, la notion d'une Algérie heureuse en faisant référence à la dimension de l'amour, de la pensée et du travail. «Je crois que nous sommes tous plus ou moins concernés par une situation dans la société où nous vivons qui n'est pas une situation favorable à l'épanouissement des individus. Il y a la nécessité de faire sortir du marasme dans lequel on se trouve, de faire sortir des possibilités, précisément, de construction d'une Algérie qui serait plus conforme à ce qu'on peut espérer. L'Algérie heureuse, c'est moins la nostalgie de ce que l'Algérie a pu être, par certains aspects, dans le passé qu'un projet qui, à mon avis, est un plan qui a de la valeur, parce que je pense que c'est dans l'enthousiasme de créer quelque chose de nouveau, de réaliser des objectifs personnels et objectifs qu'on est heureux. Cela fait allusion à la perspective de création. On doit trouver à l'horizon un avenir.» Mieux encore, Amin Khan estime que si nous voulons sortir de cette situation difficile, nous devons le faire sur la base d'une capacité rationnelle et sortir de la mythologie, y compris de la mythologie de la guerre de Libération nationale : «Nous sommes dans une situation où nous devons analyser d'une façon rigoureuse et sans concession».