Prévu pour hier, le prononcé du verdict relatif à l'affaire Mellouk a été renvoyé au 22 mars prochain. L'annonce a été faite en présence de nombreuses moudjahidate, venues apporter leur soutien à un homme qui se bat depuis 18 ans pour la vérité. Jamais une salle d'audience n'a connu une présence aussi importante de femmes, anciennes révolutionnaires, venues exprimer leur solidarité avec celui qui a fait éclater le scandale des magistrats faussaires en… 1992. L'ambiance était bon enfant jusqu'à ce qu'un policier vienne provoquer un incident. Une altercation avec une des moudjahidate a failli tourner au vinaigre. Les échanges de propos entre l'agent et les femmes se font sous le regard de la présidente, qui marque quelques secondes d'arrêt. Sur ce coup, Mellouk se lève et interpelle la magistrate. « Madame la présidente, il y a de la provocation dans la salle. Les femmes qui sont là, sont d'anciennes condamnées à mort, des révolutionnaires qui ont libéré le pays, elles ne méritent pas d'être malmenées de la sorte… », déclare Mellouk à la présidente restée de marbre face au climat tendu, qui règne dans la salle d'audience. Les femmes, à leur tête Fettouma Ouzgane, ne se laissent pas intimider par les policiers. Elles se lèvent et expriment à haute voix leur indignation, poussant la présidente à suspendre l'audience. Les cris de colère s'élèvent, mais quelques minutes plus tard, la magistrate revient à la salle et annonce le renvoi du prononcé du verdict au 22 mars. Ce qui irrite davantage l'assistance. C'est l'anarchie dans la salle. « Pourquoi ce renvoi ? Nous voulons connaître le sort réservé à cette affaire. Cela fait 18 ans que le dossier traîne. Barakat ! », lance Fettouma Ouzgane, appuyée par d'autres anciennes moudjahidate, toutes exacerbées par « la cabale judiciaire » dont est victime Benyoucef Mellouk depuis des années. Dans la foule compacte qui a fini par quitter la salle d'audience, il y avait aussi certains enfants de chouhada (martyrs de la Révolution), d'anciens moudjahidine, comme Abdelkader Souhabi, retraité des douanes, qui a fait éclater le scandale des D15 (transit de marchandise par la frontière terrestre) et d'autres anonymes. Dans le hall, il règne le même climat de colère, avant que toute la foule ne sorte dans la rue, en face du tribunal et de se disperser quelques minutes plus tard. Le renvoi du prononcé du verdict suscite l'inquiétude chez Mellouk, qui espérait en finir une fois pour toutes avec cette affaire qui l'use depuis 18 ans. « Je veux que cette cabale prenne fin. Trop, c'est trop ! Je suis fatigué de faire le va-et-vient dans les tribunaux, et ce, pour avoir levé le voile sur la vérité. Une vérité que je n'ai pas cherchée, mais que mes responsables m'ont instruit de faire éclater. Tout ce que j'ai dit est documenté. Je n'ai rien inventé », déclare Mellouk. Ce dernier, faut-il le rappeler, a été chargé, en tant que chef du service contentieux et des affaires sociales au niveau de la chancellerie, d'ouvrir une enquête sur la situation des magistrats. Ses investigations ont levé un véritable lièvre. Sur les 800 dossiers à l'étude, plus de 300 comportaient de fausses attestations d'ancien moudjahid. Mais, quelque temps plus tard, Mellouk subit le pire. Mis en prison, il a été poursuivi par le tribunal criminel pour « divulgation de secret professionnel et vol de documents confidentiels ». L'affaire est restée pendante jusqu'en 1997, lorsque le procès a été renvoyé à une date ultérieure. En 1999, Mellouk a été condamné à 3 ans de réclusion avec sursis. Une condamnation qui va coïncider avec la plainte pour diffamation déposée par deux anciens ministres de l'Intérieur, Mostefa Mohamedi, et des Moudjahidine, Mohamed Djeghaba. En février 2008, et contre toute attente, le tribunal prononce une peine de 4 mois de prison ferme, confirmée par la cour d'Alger, dans un simulacre de procès, en juillet 2009, et en l'absence des parties. Après un pourvoi en cassation, Mellouk a été rejugé le 8 mars dernier et le verdict, qui devait tomber hier, a été reporté au 22 mars prochain. Une pétition nationale de solidarité avec cet ancien moudjahid et cadre de l'Etat a été initiée par d'anciennes combattantes de la Révolution, à leur tête, Mme Fettouma Ouzgane et dont les premières signataires sont de grandes personnalités révolutionnaires. Celles-ci demandent la relaxe pour Mellouk tout en lui exprimant leur solidarité et leur soutien dans son combat pour la vérité.