La mobilisation des étudiants à travers l'ensemble des campus d'Algérie ne faiblit pas. Débrayages, rassemblements dans les enceintes des facultés et marches dans plusieurs wilayas du pays. Tel est le décor quotidien qu'offre aujourd'hui l'université, dans un contexte général de révolte populaire contre le «régime» et ses représentants. L'arrestation par la police de certains étudiants et l'usage de la force contre des manifestants ne sont pas venus à bout de ce mouvement, qui semble décidé à s'impliquer pleinement dans le hirak. Comme chaque mardi, les étudiants sont sortis, hier, occuper la rue, en dépit de la répression qui s'est abattue sur eux. Mots d'ordre : rejet de l'article 102, application de l'article 7, accordant la pleine souveraineté au peuple pour gérer la transition et choisir son destin politique, arrêt des violences policières. Il faut dire, cependant, que le mouvement estudiantin manque, à ce jour, d'organisation et de structuration, et ne semble pas parvenir encore à dégager des représentants au niveau national, ni même régional. Pratiquement, dans chaque université, des comités autonomes ont vu le jour et ont, certes, réussi à fédérer les étudiants localement, mais ils ne sont pas encore arrivés à s'interconnecter avec l'ensemble des établissements universitaires pour donner à leur mouvement une dimension nationale. Il serait, peut-être, un peu tôt pour voir un tel résultat se réaliser, compte tenu du nombre important d'étudiants recensés à travers le territoire national et de celui des universités les abritant. Il n'en demeure pas moins que des tentatives d'«unification» sont déjà lancées, ici et là, en coordination avec le corps des enseignants du supérieur. A Alger, par exemple, le comité autonome provisoire des étudiants de l'université d'Alger 2 (Bouzaréah) a appelé, jeudi dernier lors d'une assemblée générale, à «élargir le travail de coordination à l'ensemble des facultés d'Alger, mais aussi à l'ensemble des universités de la région, et ce, dans le but de parvenir à une structuration unifiée régionale, puis nationale». Cette structure, expliquent les animateurs du comité, aura pour mission d'«arrêter, en commun accord avec les enseignants, une plateforme nationale de revendications incluant les deux volets, politique et pédagogique». Les participants au débat initié par le comité ont tous insisté sur la nécessité de s'auto-organiser, loin des organisations estudiantines traditionnelles qualifiées de «satellitaires», et de lancer, au sein de la communauté universitaire, «de larges discussions sur la situation politique actuelle du pays, parallèlement à un travail de sensibilisation devant se faire à travers des conférences, des rencontres-débats et tout autre moyen susceptible d'éclairer encore plus la famille universitaire sur les défis à relever et sur son rôle en cette période cruciale pour le pays». Afin de renforcer le mouvement de protestation populaire, étudiants et enseignants se sont mis d'accord sur la nécessité de poursuivre les marches à l'extérieur des campus, tout en observant deux jours de grève, le mardi de chaque semaine, et une deuxième journée fixée différemment par les étudiants dans chaque université. De son côté, le comité autonome provisoire des enseignants de l'université d'Alger 2, réuni en assemblée générale, a dénoncé vigoureusement toute forme de restriction répressive des libertés collectives et individuelles que le pouvoir illégitime continue à imposer en ce moment historique et crucial que traverse l'Algérie. L'arrestation des militants, des étudiants et des syndicalistes, l'usage de la force contre les manifestants, l'évacuation des places publiques par la force, dénotent, selon le comité, la volonté politique claire de maintenir un Etat policier, contesté quotidiennement par tout le peuple algérien. Ces agissements plus qu'arbitraires ne font, aux yeux des enseignants, que «renforcer notre volonté de poursuivre notre mouvement démocratique, pacifique, jusqu'au triomphe de la volonté populaire pour bâtir une République véritablement démocratique et sociale».