La baisse de l'euro induite par les turbulences que traverse la Grèce peut-elle avoir un impact sur les revenus de l'Algérie qui exporte essentiellement des hydrocarbures en dollars et qui paye en euros le plus gros de ses importations ? A cette question, Mourad Preure, expert pétrolier international et associé au cabinet Emergy, estime que « même si les termes de l'échange évoluent en notre faveur, il faut être réaliste car l'effet d'ascenseur entre le dollar et le prix du pétrole va encore fonctionner : lorsque le prix de l'un monte, l'autre baisse et inversement ». L'expert pétrolier juge tout de même que nos avoirs financiers en dollars vont gagner en valeur et leur pouvoir d'achat augmenter. « Je pense que pour faire des acquisitions d'actifs à l'étranger, dans la zone euro notamment, nous avons en quelque sorte une deuxième chance. Il faut la saisir, ce peut être la dernière », note M. Preure, qui estime qu'« il faut porter nos grands acteurs économiques aux tailles critiques qui constituent les standards aujourd'hui. Il faut entrer dans le capital des entreprises qui comptent, mettre celles-ci en synergie avec notre développement industriel et technologique ». Celui-ci met en relief l'urgence de l'action à entreprendre en précisant qu'« il faut agir vite ». L'expert étaye ses propos en relevant que la crise actuelle ne laissera pas place à « un monde de stabilité sous un ciel serein ». « Ce sont des crises systémiques qui vont être récurrentes avec une diffusion de l'instabilité et de l'entropie sélectivement vers les pays les plus faibles », précise M. Preure, qui tient à relever que nous sommes face à une dichotomie entre une sphère financière à présent interconnectée à l'échelle de la planète et qui fonctionne selon une logique de court terme, qui privilégie la volatilité et la maîtrise du risque, « une économie de casino en quelque sorte d'une part, d'autre part une économie réelle orientée selon des logiques de long terme, hautement capitalistique avec une accélération de l'obsolescence des produits et la recherche de tailles critiques de plus en plus élevées ». Dans ce contexte où les acteurs et les marchés sont globalisés, les Etats doivent sans cesse redéfinir leur rôle et les échelles dans lesquelles s'exercent leurs actions, note M. Preure, qui fait remarquer que dans la crise actuelle en Europe, il y a un fort risque de contagion pour la zone euro. Il estime à ce propos que les conditionnalités qui accompagneront inévitablement la solidarité européenne sont de la même essence que « les politiques d'ajustement structurel de triste mémoire ». Leur généralisation aux PIGS (Portugal, Italie, Grèce et Espagne), relève l'expert pétrolier, mais aussi à la France qui vit une crise réelle et au Royaume-Uni auront « un effet papillon » sur les pays qui sont à la périphérie de l'Europe et qui, par leur commerce et leur développement, y sont articulés. « Il faut aussi prévoir une sévère montée du protectionnisme dans ces pays. Il aura un effet sur la dynamique de partenariat euroméditerranéen », prévient encore l'expert international.