L'absence du roi Abdellah de Jordanie au 17e sommet de la Ligue des Etats arabes, qui se tient depuis hier à Alger, et le rejet de la résolution jordanienne concernant la normalisation des relations avec l'Etat hébreu ont en quelque sorte « détourné » l'attention de la communauté internationale et les médias sur cette rencontre. Pourtant, le royaume hachémite de Jordanie n'est pas pour autant connu pour un Etat qui s'engage dans des réformes allant dans le sens de la démocratie et du progrès. La situation politique et la question des libertés dans ce royaume sont jugées déplorables. La situation des droits des femmes, de la liberté de la presse et des droits de l'homme suffit pour dire que ce royaume constitue un exemple de dictature. La société civile n'échappe pas aussi à la répression. Les associations professionnelles, à titre d'exemple, s'opposant à l'accord de normalisation signé avec Israël en 1994, ont été interdites et décrétées illégales. Exprimant son avis sur la situation dans le pays, un ancien ministre jordanien a déclaré : « Nous avons un Etat policier avec une façade démocratique. » Propos rapportés par Reporters sans frontières (RSF) dans son rapport annuel 2003 sur la presse en Jordanie. Une presse qui ne cesse d'être persécutée par l'existence d'un texte de loi répressif. « Les autorités ont soufflé le chaud et le froid sur les médias jordaniens », a signalé RSF dans son rapport annuel 2004. Les dispositions du code pénal, ajoute RSF, les plus répressives à l'égard de la liberté de la presse ont été supprimées, mais un très fort contrôle gouvernemental sur les journaux et la radiotélévision demeure. Le gouvernement est le détenteur majoritaire des plus grands titres de la presse. « L'année 2003 a été une année maussade pour la liberté de la presse en Jordanie en raison d'une alternance d'avancée et de recul », juge RSF. Durant ces années, plusieurs journalistes ont fait l'objet d'arrestation et d'emprisonnement. Les moyens de communication restent encore sévèrement contrôlés. Internet demeure toutefois, pour les Jordaniens, un espace de liberté préservé. La situation des femmes jordaniennes n'est pas aussi reluisante. Une enquête effectuée sur dix ans a révélé qu'au moins 30 femmes sont assassinées par an sous le prétexte de « crimes d'honneur ». D'après un juriste jordanien, ce chiffre reste inférieur à la réalité. Selon des statistiques effectuées par la police, environ 70% de ces crimes sont commis sur des femmes âgées de 15 à 27 ans. Le gouvernement jordanien emprisonne des femmes menacées de « crimes d'honneur » plutôt que leurs proches masculins qui les menacent. Dans le cas où des femmes seraient tuées, les auteurs de ces meurtres reçoivent une sanction minimale. La femme continue de subir une discrimination dramatique. L'organisation de défense des droits de l'homme Human Rights Watch s'insurge contre ces pratiques contraires aux droits et aux libertés humaines. « Pour la société, la vie ou la mort d'une femme repose sur un simple soupçon. Une femme soupçonnée d'avoir déshonoré sa famille doit mourir ! Les meurtriers, généralement des pères, frères ou maris, sont considérés comme des héros et applaudis pour avoir ‘‘purifié l'honneur'' de la famille tandis que les femmes sont enterrées dans l'anonymat le plus complet », signale l'organisation internationale Droits des femmes.