Alors que Chakib Khelil, ancien ministre de l'Energie, et Abdessalem Bouchouareb, ex-ministre de l'Industrie et des Mines, n'ont toujours pas répondu à la convocation de la Cour suprême et risquent de faire l'objet d'un mandat d'arrêt international, l'ex-ministre de l'Industrie, Youcef Yousfi, et l'ancien Premier ministre, Ahmed Ouyahia, ont été inculpés et placés en détention dans le cadre de l'affaire Mahieddine Tahkout. Placé sous contrôle judiciaire dans le cadre de l'enquête sur le patron du groupe ETRHB, Ali Haddad, l'ex-ministre de l'Industrie, Youcef Yousfi, a été inculpé, hier, dans l'affaire Mahieddine Tahkout, patron du groupe Cima Motors, et mis en détention par le magistrat instructeur de la Cour suprême pour «octroi d'indus privilèges», «abus de fonction», «trafic d'influence», «corruption» et «dilapidation de deniers publics». Dans le cadre de cette instruction, les mêmes chefs d'inculpation ont été retenus contre l'ex-Premier ministre, Ahmed Ouyahia, incarcéré à El Harrach, dans l'affaire Ali Haddad. Le 11 juillet, il avait fait également l'objet d'un mandat de dépôt pour avoir octroyé d'indus privilèges aux frères Arbaoui, de Kia Motors, au patron du groupe Sovac, Mourad Oulmi, tous placés en détention, et commis les délits d' «abus de fonction», «trafic d'influence», «corruption» et «dilapidation de deniers publics». Pour sa part, l'ex-ministre des Travaux publics et des Transports, Amar Ghoul (sénateur du tiers présidentiel, qui s'est désisté de son immunité parlementaire et président du parti Taj), devrait comparaître pour ces deux affaires, mercredi prochain, et non pas pour le dossier de l'autoroute Est-Ouest, qui a été rouvert au niveau de la Cour suprême, au moment où les pourvois en cassation introduits aussi bien par le parquet général que par la défense de nombreux accusés, poursuivis et condamnés par le tribunal criminel d'Alger à des peines de prison, devaient être examinés par cette haute juridiction. Il faut dire que le nom de Ghoul a été cité à plusieurs reprises lors de ce procès et son implication avec les sociétés chinoises bien révélée. A l'époque, l'enquête préliminaire effectuée par les officiers du défunt Département du renseignement et de la sécurité (DRS), alors dirigé par le général Toufik (en détention à la prison militaire de Blida), avant son éviction, avait mis en exergue l'implication de Ghoul, à travers la prise en charge des soins médicaux de son fils par les sociétés chinoises, et de nombreux autres cadeaux. Ghoul n'a pas répondu à la convocation du juge d'instruction et a préféré répondre à des questions que ce dernier lui a envoyées par écrit. «Mensonge et surréalité», étaient les seules répliques que l'ex-ministre opposait aux interrogations du magistrat. Aujourd'hui, le contexte n'est plus le même et Amar Ghoul se voit rattrapé non seulement par cette affaire, mais aussi par celles qui lui ont succédé, à savoir les privilèges «indument» accordés à Ali Haddad et Mahieddine Tahkout, des hommes d'affaires qui gravitaient autour du frère conseiller du Président déchu. Tout comme lui, Chakib Khelil, ancien ministre de l'Energie, est également rattrapé par l'affaire Sonatrach, dont il a échappé grâce au frère du Président déchu, mais aussi aux bons offices de Amar Saadani, cet ancien président de l'Assemblée nationale et ex-secrétaire général du FLN (qui détient des biens immobiliers dans l'un des quartiers parisiens les plus huppés, où il réside actuellement), lui aussi impliqué dans l'affaire de détournement de plus de 3200 milliards de centimes des fonds de la GCA (Générale des concessions agricoles). Après avoir fait l'objet d'un mandat d'arrêt international, en raison de son implication dans le dossier Sonatrach, lui, son épouse et ses deux enfants, Chakib Khelil a réussi à annuler les décisions du tribunal d'Alger et à revenir au pays, après avoir été blanchi de manière suspicieuse, en se présentant comme une victime. Il fait une tournée dans quelques zaouïas dans l'espoir de se présenter comme éventuel candidat à la succession, alors qu'à Milan, en Italie, le procès Saipem prouve que plus de 198 millions d'euros ont été versés à des responsables algériens, par la partie italienne, pour obtenir des marchés en Algérie, à l'époque où Chakib Khelil était premier responsable du secteur de l'Energie et avait comme conseiller financier Farid Bedjaoui, celui-là même qui a été condamné en Italie pour avoir servi d'intermédiaire dans ces transactions de corruption. Dès la première manifestation de colère contre le régime de Bouteflika, le 22 février, Chakib Khelil est retourné aux Etats-Unis, sans couper ses interventions sur les réseaux sociaux. Il s'est déclaré prêt à répondre aux convocations de la justice algérienne, mais jusqu'à maintenant, il ne s'est pas présenté et risque de faire l'objet d'un mandat d'arrêt. Tout comme d'ailleurs Abdessalem Bouchouareb, l'ex-ministre de l'Industrie, que l'on retrouve cité dans toutes les affaires avec les concessionnaires automobile et des gros bonnets de l'industrie. Installé à l'étranger, il n'a toujours pas comparu devant la Cour suprême.