Présentée au palais de la culture Malek Haddad, avant-hier, à 18h, la pièce Les filles de Lear, de Sid-Ahmed Kara, énième variation sur le thème du drame de William Shakespeare, s'est déroulée dans une salle aux trois quarts vide. Autre couac, le manque de respect total dont ont fait preuve des teenagers en manque de défouloir envers les acteurs. Des cris d'animaux, dès extinction des feux, aux sonneries stridentes de portables, en passant par quelques inepties lancées à pleine voix, on aura tout entendu. Pour en revenir à la pièce, il était clair qu'elle s'adressait à un public initié, tant elle passait sur certains aspects nécessaires à la compréhension de l'ensemble, à l'exemple de l'intrigue secondaire se déroulant au château de Gloucester, quasiment ignorée par l'auteur (quoique furtivement évoquée), qui a voulu sans doute axer son travail sur le roi Lear et ses trois filles. En procédant à des « coupes », Sid-Ahmed Kara concevra une version allégée du « Roi Lear », le réduisant au message simpliste de « L'ingratitude des enfants est la pire des souffrances », balayant d'un coup toute la complexité de l'œuvre de Shakespeare, faisant la part belle aux chorégraphies exécutées par les souples Mourad Oudjit, Mounira Rouabhi Fissa, Souad Cheikh Djaousti et Adila Soualem. Dans la salle, constatant qu'ils sont en nombre suffisant, les gosses se sont retirés pour jouer au football, au moment même où Cordélia se faisait assassiner par ses bourreaux et que ses deux sœurs mouraient empoisonnées. À la fin de la représentation, le roi Lear dut se sentir vraiment seul…