Il n'existe rien dans la nature que les vents ne peuvent transporter d'un endroit à un autre de la terre. Le sirocco vient du désert et son souffle brûlant, poussé par un des accélérateurs de la Diagonale du fou, signe son passage en embaumant votre atmosphère d'un musc qui peut être oriental comme asiatique. Si vous n'avez rien remarqué de tel, tant mieux. Cela veut dire, déjà, que la dernière folie du président turc Recep Tayyip Erdogan reste fixée, ou en suspension, dans sa géopolitique d'origine. Quelque part dans un cercle d'enfer entre la Turquie, la Syrie et le «Bled kurde» qui se défend comme il peut contre les tentatives d'extermination par ses multiples ennemis. Ce n'est pas pour distiller la peur ou être de mauvais augure, mais quand une menace mutuelle est entretenue par deux va-t-en-guerre aussi imprévisibles et belliqueux que Donald Trump et Recep Tayyip Erdogan, il ne faudrait pas s'étonner de voir le ciel illuminé par la fulgurance des missiles tirés de loin. En tout cas, par les déclarations intempestives dont ils ne sont guère avares, les deux hommes sont assez expérimentés dans l'art de menacer la paix… Et pas seulement dans leurs pays respectifs. Ils lui tendent des traquenards dans le monde entier, partout où elle a des chances de nidifier et de s'enraciner. Le chef de la première puissance mondiale rêve debout à ses guerres contre les faibles et les pauvres, d'un côté, et Erdogan qui somnole dans les rencontres internationales, l'esprit plongé dans la résurrection du califat ottoman dont il rêve d'être l'héritier «califal», d'un autre côté. Les deux puissants de la planète, chacun avec sa dimension, réduite ou en expansion, se montrent prêts en toute occasion à livrer des batailles qui ne méritent pas qu'on leur condescende le moindre sacrifice. Les deux Présidents ont-ils bien tout prévu et calculé ? Rien n'est moins sûr. Depuis lundi dernier, qui a culminé dans les menaces proférées par l'un et l'autre, puis mercredi, jour de début des bombardements turcs dans le Kurdistan syrien, la décision irréfléchie d'Erdogan a été accueillie par des réactions de condamnation fermes aussi bien des dirigeants européens que ceux d'autres pays siégeant au Conseil de sécurité de l'ONU, saisi officiellement pour imposer l'arrêt des raids turcs. Plus grave, les combattants kurdes du FDS ont accusé la Turquie d'avoir bombardé une prison dans le nord de la Syrie, où se trouveraient des terroristes de Daech. Qui se retrouveraient, de ce fait, remis en liberté malgré eux.