Ils font dans la perturbation. » Phrase accusatrice de Mustapha Benbada, ministre du Commerce, à l'endroit des 10 laitiers qui ont procédé à la réduction de leur production de lait en sachet. Intervenant hier lors d'un point de presse animé en marge de la tenue de la Journée nationale de la prévention contre les risques d'intoxication alimentaire, M. Benbada s'en est pris violemment à ce groupe de transformateurs de lait. « Ce ne sont même pas des producteurs. Ils mélangent de l'eau avec de la poudre », dénonce-t-il. M. Benbada répondait à une question sur la crise de sachet en lait qui commence à s'installer sur le marché. « La pénurie de ce produit n'est qu'une fausse tension », réplique-t-il, sèchement. Les propriétaires de ces laiteries privées, constitués en collectif de défense, se sont insurgés, entre autres, contre les « restrictions imposées » par l'Office national interprofessionnel du lait (ONIL) dans l'approvisionnement en poudre de lait. Faux, renchérit le ministre. « L'ONIL dispose de quantités suffisantes en poudre de lait », affirme-t-il, comme pour réduire à néant l'argument des transformateurs. M. Benbada a omis, par contre, de rappeler que l'ONIL avait décidé en 2008 de réduire de 50% les quotas accordés à certaines laiteries. Décision qui a ramené nombre de laiteries privées à fonctionner au ralenti et à observer des arrêts de production, pour certaines. L'ONIL a importé 145 000 t de poudre de lait en 2008 contre 120 000 t en 2009, soit une baisse de 25 000 t. La facture globale de lait et produits laitiers s'est établie à 862,76 millions de dollars en 2009, contre 1,28 milliard de dollars en 2008, soit une réduction de 32,9%, selon des chiffres officiels. Ceci dit, M. Benbada a clairement affiché son soutien indéfectible à la politique adoptée par son collègue du gouvernement, Rachid Benaïssa. « Je soutiens mon collègue du ministère de l'Agriculture », dira-t-il. La politique portant instauration d'un système de quotas, souligne-t-il, au profit des producteurs visait essentiellement la réduction des importations massives de la poudre de lait et l'augmentation de l'intégration du lait cru dans la production nationale. Au cœur de cette politique, la subvention accordée par l'Etat, évaluée à 12 milliards de dinars en 2009, se répartit à hauteur de 12 DA/litre à l'éleveur, de 5 DA/litre au collecteur, et de 4 DA/litre à l'intégration du lait cru dans la production du lait en sachet subventionné à 25 DA/litre. Les besoins du marché sont estimés à 1,5 milliard de litres. La production de lait cru est passée de 2,23 milliards de litres en 2008 à 2,45 milliards de litres en 2009. De 18% en 2009, soit une production de 400 millions de litres, il est prévu un taux d'intégration du lait cru de 35% en 2010, soit une production de 550 millions de litres. En 2009, l'Algérie a diminué ses importations de 40 000 t de poudre de lait, soit un gain de près de 100 millions de dollars. Le ministre a laissé entendre que ces transformateurs de lait veulent saborder ladite politique. « Ils font dans la résistance au changement. Ceci alors que l'écrasante majorité des transformateurs a adhéré à cette vision », a fait savoir le tout nouveau ministre du Commerce. Avant-hier, la Confédération des industriels et producteurs algériens (CIPA) a désavoué les propriétaires de ces laiteries privées. « Si certaines laiteries ne veulent pas produire, d'autres le feront », avait estimé son président, Abdelwahab Ziani, pour qui l'ONIL « a honoré ses quotas au profit des laitiers et que la mesure de restriction de la distribution de lait, en dehors de la région d'implantation des laiteries, a été décidée par l'office afin d'équilibrer l'offre nationale ». Même rengaine au niveau du ministère de la tutelle. Lâché de partout, ne bénéficiant du reste d'aucun soutien, ces producteurs privés se trouvent de fait livrés à eux-mêmes.