Reconnu coupable de l'assassinat d'Ali Tounsi, ex-patron de la police, le colonel Oultache a été condamné durant la nuit du jeudi à vendredi dernier, à la prison à vie, par la cour d'appel criminelle, d'Alger, alors que le procureur général avait requis la condamnation à mort. Durant le procès, Oultache a déclaré avoir blessé le défunt, qui selon lui, a été « achevé par des éléments de la police du ministre de l'Intérieur, YazidZerhouni ». Cinq ans après sa condamnation à la peine capitale, pour l'assassinat d'Ali Tounsi, ancien patron de a police, le colonel Chouaib Oultache a comparu jeudi dernier devant la cour d'appel criminelle d'Alger, pour les mêmes faits, « homicide volontaire avec préméditation,guet apens, tentative d'assassinat et détention d'arme à feu sans autorisation ». Après la condamnation à mort requise par le parquet général, Oultache écope d'une peine perpétuelle, prononcée hier vendredi matin (2 heures). A l'ouverture de l'audience, Oultache, qui a pris beaucoup de poids, a du mal à rejoindre la barre. D'emblée, il déclare : « je suis un colonel de l'armée, un pilote de 1ère classe, et un moudjahid. Comment puis-je tuer un moudjahid ? » etprécise : « lorsque j'ai été mis à la retraite, je voulais aller travailler chez Khalifa Aiways, mais le chef de l'Etat-major de l'Anp, le défunt Mohamed Lamari, m'avait proposé d'aider Ali Tounsi, à créer une unité aérienne. Il m'a confié aussi la modernisation. J'étais un très proche collaborateur du DG (directeur général) et à ce titre, nous avons beaucoup travaillé ensemble. J'ai modernisé les services de la sureté. J'ai réussi à leur faire abandonner le papier. Tout a été informatisé. Les 10 000 machines à écrire ont été remplacées par des PC, dans toutes les suretés urbaines des 48 wilayas. Le DG été content (...) Le ministre de l'Intérieur, Yazid Zerhouni, m'avait demandé appelé à son bureau. Je lui ai parlé de ce projet de modernisation à travers les PDA, des sortes de petits micro-ordinateurs. Il n'était pas d'accord. Il trouvait la technologie des Iphone plus performantes. J'ai informé le DG, il m'a dit de continuer en précisant que le président lui avait donné le feu vert ». La juge le ramène à la journée du 25 février 2010. Il affirme que c'est Youcef Daimi, qui l'a appelé la veille pour l'inviter à la réunion bilan. « Je n'étais pas prêt pour exposer le projet. Le DG était un peu en colère. On lui a dit que la gendarmerie était plus en avance mais notre système était performant. Nous l'avons eu clé en main auprès de Condor. Je voulais lui parler avant la réunion pour lui demander un délais», dit-il. Le matin du 25 février, avant la réunion, il se présente au bureau d'Abdelaziz Dahlal, secrétaire particulier de Tounsi. Il demande à voir ce dernier. Quelque temps plus tard, il est reçu mais « froidement », dit-il. « C'est mon ami, je le connais très bien. Je lui ai dit que l'exposé n'était pas prêt et il m'a répondu que c'est la journée où je dois rendre des comptes, que j'étais à la traine, que je le menais en bateau et que le système de transmission n'était pas fiable. Je lui ai dit que le ministre de l'Intérieur, YazidZerhouni, s'est opposé aux achats. Mais lui me répondait qu'il y avait de l'argent et que je n'ai rien fait. ». « Il m'a traité de traitre, je lui ai dit c'est toi le traitre, le harki » Oultache précise que trois mois avant, il a pris part à une réunion avec le chef de l'état-major de l'Anp, le défunt Ahmed Gaid Salah, le général Toufik, le commandant des forces aériennes, et le patron de la protection civile, pour l'acquisition groupé de 72 hélicoptères. Il en est de même pour le dossier de la télésurveillance, qui consistait en l'installation de 2000 caméras. Le budget était au niveau du MDN, et le projet, a été validé « mais Tounsi, me reprochait d'avoir tout donné à l'Armée puis il m'a traité de traitre. Je lui ai dit, c'est toit le traitre, le harki. Il a pris un coupe-papier et m'a attaqué. Je lui ai dit que j'étais armé, mais il a continué à avancer vers moi, j'ai tiré une balle en l'air, il a poursuivi son avancé, j'ai tiré une deuxième balle en visant sa main. Je ne peux pas le tuer. Demandez à sa famille, à la police, a l'armée s'il y a un problème entre nous. Entre nous, il n'y avait ni affaire de femmes, ni d'alcool, ni d'argent. Comment puis-je lui tirer dessus ? ». La juge : « les deux balles que vous avez tiré, l'une à la tête et l'autre au cou, l'ont tué... ». L'accusé : « je n'ai pas visé la tête, mais le plafond ». La juge : « vous étiez en colère, il avait des suspicions sur les marchés octroyés à votre gendre ». L'accuse : « l'enquête a duré 15 jours et ils n'ont rien trouvé. Un mois avant, ils m'ont félicité pour mon travail, mais ce rapport a été caché par le procureur général, Belkacem Zeghmati. Les 25 personnes ont obtenu la relax et j'ai été le seul à avoir été condamné ». Interrogé sur son armes, Oultache explique : « j'ai commencé à prendre une arme après le reportage de M6 sur l'unité aérienne. J'été devenu une cible. J'ai décidé d'avoir sur moi, une arme tout le temps sauf au travail ». La juge : « pourquoi avoir pris votre arme à cette réunion ? ». Oultache : « je voulais faire des courses au marché Nelson. C'était la veille de la fête du Mawlid. Je l'ai prise». La juge revient sur la dispute entre Tounsi et l'accusé et ce dernier révèle : « il m'a traité de traitre je lui ai dit que c'est lui le traitre, le harki. Il a pris le coupe-papier et m'a attaqué». La juge : « vous êtes militaire et vous connaissez les conséquences d'une arme à feu. Tounsi avait juste un coupe-papier ». L'accusé : « il m'a attaqué. Il avançait vers moi. Je ne comprenais pas. J'ai sorti mon arme en lui disant que j'étais armé et j'ai tiré en l'air ». La juge : « vous lui avez tiré deux balles, une à la tête et l'autre au cou.. ». L'accusé : « jamais, ce n'est pas moi ». Le juge : « vous étiez seul dans le bureau ». L'accusé : « ils sont tous rentré dans le bureau ». La juge : « vous aviez déclaré vouloir vous suicider pourquoi ? ». L'accusé : « parce que ca s'est passé rapidement. Je n'ai pas compris ce qui s'est passé c'était la panique ». Oultache continue à nier avoir visé la tête et la juge réplique : « qui était avec vous dans le bureau ? ». L'accusé : « la propre police du ministre de l'Intérieur, par celle de la DGSN. La plupart de ces policiers étaient avec le ministre. Ce sont eux qui ont tué pas moi ». La juge rappelle à Oultache qu'il avait demandé pardon pour le crime, mais lui déclare : «oui mais j'ai dit que ce n'était pas moi qui l'ai tué. J'ai visé sa main, je ne voulais pas lui faire du mal. Si j'avais l'intention de le faire, je l'aurais fait chez-lui il habite à coté de moi, je ne viendrais pas ici au milieu des lions. Et pourquoi ? A cause d'un rapport d'inspection ? ». La juge : « vous auriez pu quitter le bureau au lieu d'utiliser votre arme ». L'accusé : « il m'a attaqué... ». La juge : « pourquoi n'avez-vous pas lancé l'alerte pour lui porter secours ? ». Oultache : « pour qu'ils me tuent ? Je sais qu'ils me tueront ». La juge lui rappelle qu'il avait reconnu que les balles qui ont tué Tounsi, étaient les siennes et Oultache réplique : « ce sont eux qui ont fait l'enquête ». La juge : « vous étiez seul au bureau ». « Je voulais me suicider mais mon arme s'est enrayé » L'accusé : « il sont rentré après». La juge : « Tounsi était déjà par terre ? ». L'accusé : « il était à plat-ventre. Je ne comprenais rien. Quand ils sont entrés j'ai entendu une voix qui disait : achevez-les tous les deux ». La présidente : « il baignait dans son sang ». L'accusé : « moi aussi je saignais. Je ne l'ai pas visé. C'est une amitié de plus de 20 ans. Il y a un grand respect entre nous ». La juge : « votre épouse a affirmé que ce jour là, vous lui avez dit de ne pas prendre au sérieux les articles de presse en référence à un article publié sur le journal Ennahar ». Oultache nie, en disant qu'il ne lie pas l'arabe. A propos de l'arme qu'il détient sans autorisation, l'accusé déclare : « je suis commissaire divisionnaire. J'ai le droit d'avoir une arme avec ma carte professionnelle seulement ». La juge insiste sur le fait les tirs mortels de l'accusé et ce dernier persiste à nier, avant d'accabler le juge d'instruction, qualifié de « spécialiste des manœuvres » en expliquant « j'ai dit que j'ai tiré quatre balles et lui écrit que j'en ai tiré 2. J'ai déposé plainte contre lui ». La présidente : « vous êtes sorti du bureau laissant le défunt par terre, pour aller appeler Abdrabi, Daimi et Houalef. Si Tounsi était vivant, il se serait relevé ». L'accusé : « il n'était pas mort... ». Il confirme être sorti pour ramener les trois cadres, « mais pas pour les tuer, mon arme était bloquée. J'ai donné un coup à Abderabi, mais j'ai été blessé. Je suis resté sur une chaise à l'intérieur du bureau ». La magistrate : «Daimi dit que vous lui avez déclaré : je vais vous achevez tous ». L'accusé : « ils ont tous confectionné ce dossier ». La juge : « pourquoi lui avoir donné un coup de crosse à la tete, ne vouliez vous pas mourir comme vous l'aviez déclaré ? ». L'accusé : « oui je voulais me suicider, mais mon arme s'est bloquée ». La présidente revient sur les balles trouvées sur les lieux, et Oultache lance : « ce sont des balles de 8 mm les miennes sont de calibre 9mm ». La juge : « votre épouse affirme qu'elle ne vous a jamais vu avec une arme ». Le procureur général, lui rappelle que lors de la reconstitution des faits, en présence de ses avocats, il a reconnu avoir tiré 4 balles, mais lui dément. La juge refuse d'essayer de placer les balles dans l'arme, tel que réclamée par la défense, « pour des raisons de sécurité » dit-elle. Elle appelle Abdelmoumène Abdrabi, qui raconte qu'il était dans la salle de réunion, mais avant, il avait salué Oultache qui attendait au secrétariat. Vers 11 heures passées, Abdelaziz Dahlel, secrétaire du DG, « est venu nous dire à moi, à Daimi et à Boumedienne Ouazaâ, que le DG veut nous voir. Nous avons longé le couloir et Oultache est apparu debout devant la porte du bureau du DG. Il avait une arme à la main. Arrivé à son niveau, il nous a lancé, regardez où vous nous avez mené. La porte du bureau était légèrement ouverte. Le corps du Dg était gisant par terre. J'ai tenté de le maitriser en bloquant sa main ; Dahlel est rentré puis sorti en criant, il a tué le DG. Il a essayé de le tenir par la derrière et lui braquait toujours son arme sur nous. Je saignais beaucoup. Je suis arrivé à m'enfuir ». Abdrabi, affirme qu'Oultache « voulait s'accaparer de tous les services » et que le système de transmission qu' il était chargé de moderniser « était très défectueux et vulnérable, au point où les communications de la police étaient entendues par tous, ». Les mêmes propos sont tenus par Youcef Daimi, avant que Mme Tounsi, très affectée, ne passe à la barre, pour dire, les larmes aux yeux, celui qui « tue une âme finira en enfer » et de conclure : « je veux juste que justice soit rendue ». « C'est fini, je lui ai appris ce que c'est un traitre» La juge entame l'audition des témoins par Abdelaziz Dahlal, qui corrobore la version de Abderabi et Daimi. Il commence par demander une traduction de l'article d'Ennahar, qu'il a remis au défunt, lequel n'a rien dit. Il est retourné au secrétariat, où Oultache attendait. « Il avait une mauvaise mine. Il a pris un comprimé et voulait à tout prix voir le DG pour 5 mn. Il a tardé, j'ai entendu 2 coups de feu, mais je pensais que c'était des pétards. J'ai essayé de joindre par téléphone le DG mais il ne répondait pas. Quelques temps plus tard, Oultache est venu me dire que le DG veut voir Daimi, Abderabi et Ouazaâ. Je les ai dirigé vers le bureau du DG et à l'entrée, se trouvait debout Oultache, une arme à la main. La porte était entrouverte. Je suis rentré, je n'ai pas vu le DG sur la chaise et au moment de sortir j'ai vu son corps par terre gisant dans son sang. Je suis ressorti, j'ai vu Oultache entrain de diriger son arme sur Abdrabi, j'ai tenté de le maitriser en le tenant par l'arrière, mais en vain. J'ai couru pour donner l'alerte ». Le même témoignage est fait par Abdelhamid Zebouchi, directeur des ressources humaines, qui ajoute cependant, que lorsqu'il a vu Oultache avec une arme, « j'étais le seul à lui avoir dit laisse nous prendre le monsieur, il est blessé. Il m'a répondu ; c'est fini, je lui ai appris ce que c'est, un traitre ». Il affirme être certains, que lorsqu'il est rentré dans le bureau, Tounsi, était déjà mort, depuis un bout de temps, baignant dans une marre de sang coagulé ». La juge le confronte à Oultache et ce dernier crie : « c'est un menteur. Ce n'est pas vrai. Il n y a pas un peureux comme lui ». Le témoin : « si son arme n'était pas enrayé, il nous aurait tous tué ». Oultache : « parce que j'avais un alachnikov ». Des témoignages confortés par Salah Dahmane Belarbi, avant que les trois gardes rapprochés de Tounsi, ne témoignent. Ahcène Hadj Kaci, était à deux étages plus bas, lorsqu'il a entendu un message radio, appelant à la fermeture de toutes les issues. Etonné, il se dirige vers le bureau du DG, mais le protocole, le stoppe en lui disant « Oultache est en train de tirer avec une arme. Je ne pouvais rien faire. Deux éléments de mon groupe sont rentrés par le centre opérationnel, ils se sont accrochés avec lui. C'est un ancien militaire, je ne savais pas quel type d'armes il avait. Lorsque les coups de feu se sont arrêtés j'a pu monter. J'ai couru et j'ai cassé la poigné de la porte du bureau. La porte s'est ouverte. Oultache était assis sur une chaise, tenant son arme pointée vers la porte. Mon collègue, Ait Allaoua avait tiré une balle, et je lui ai dit d'arrêter. On lui a enlevé l'arme. Tousi, était par terre». La défense d'Oultache réplique. « Comment se fait-il qu'il y a 13 impacts de balles sur le mur derrière le bureau de Tounsi, alors que vous dites qu'il y a eu un seul tir à l'intérieur ? ». Le témoin : « je ne sais pas ». Mhamed Hamadou, un autre garde, rapporte presque les mêmes faits. Il est rentré par la cafétéria, « en voyant Oultache avec une arme, devant la porte du DG, Madjid Ait Allaoua, lui a lancé : rends toi et dépose ton arme. Mais il a refusé et pointé celle-ci vers nous. Nous avons tiré. Une seule balle l'a touché à l'abdomen. Nos collègues ne pouvaient pas remonter. C'était risqué. Il s'est retiré dans le bureau. Kaci et Ait Allaouia sont entrés ». Anis Rahmani est le dernier témoin. Il affirme avoir obtenu par un appel anonyme, des informations sur le gel de la signature des contrats de l'unité aérienne dirigée par Oultache, qu'il a donné à une journaliste pour les vérifier. Après recoupement elle a publié son article. Nous reviendront dans notre édition de demain pour la suite. Advertisements