Le Parlement libyen a déjà transmis tous les amendements techniques concernant les élections à la Haute Commission nationale électorale (HCNE), selon une déclaration du député Aissa Laaribi à la chaine Libya Al Ahrar, diffusant à partir de la Turquie. La délégation de l'ONU ne peut pas exiger des amendements d'ordre politique à l'opération électorale, a-t-il ajouté, en précisant que «seuls les responsables en poste n'ont pas le droit de se porter candidats aux élections». Mais certains politiques, comme Khaled Mechri, le président du Conseil de l'Etat, d'obédience islamiste, continue à s'opposer au processus électoral. Il y a de ce fait pression sur la HCNE pour lancer les élections. La Libye vit en ce moment une situation de ferveur, rappelant étrangement celle du printemps 2012, à la veille des premières élections libyennes de juillet 2012, constatent plusieurs analystes et observateurs. «Il est clair que les Libyens en ont assez de cette situation intérimaire qui ne leur a apporté que des malheurs avec une guerre meurtrière et une corruption généralisée», assure le politologue Ezzeddine Aguil. Ce dernier pense que «des têtes vont tomber, lors des prochaines élections, notamment du côté islam politique, que l'on accuse d'être derrière le chaos». Et c'est ce qui justifie le refus des Frères musulmans de tenir ces élections, à l'image des propos de Khaled Mechri, (cité en haut), toujours selon le politologue. Néanmoins, une cinquantaine de personnalités libyennes ont déjà exprimé leur intention de se présenter à l'échéance présidentielle, suite aux déclarations de Imed Essayah, président du HCNE autorisant aux candidats de commencer leur campagne et de réunir les parrainages nécessaires, qui s'élèvent à 5000 pour la présidentielle et à 500 pour les parlementaires. L'euphorie ne se limite pas, par ailleurs, à l'Est libyen. Des figures de proue de Misrata, plaque tournante de l'économie libyenne, sont déjà impliquées à fond dans la course. L'ex-ministre de l'Intérieur, Fathi Bach Agha, fait de la campagne depuis septembre dernier. Bach Agha était pourtant candidat malheureux à présider le gouvernement durant l'actuelle phase de transition. Il avait fait campagne avec le président du Parlement Aguila Salah. Certains avaient dit en février dernier que leur perte à Genève était prévue, puisque les membres du Conseil présidentiel et le chef du gouvernement n'ont pas droit à se représenter aux élections générales, ce qui est en vigueur dans la loi électorale. Le Misrati vice-président du Conseil présidentiel, Ahmed Myitigue, est également candidat. Il s'agit de l'homme qui avait négocié avec le maréchal Haftar l'arrêt des hostilités contre une nouvelle répartition plus équilibrée des revenus du pétrole. Ce fut en septembre 2020 et c'était l'étape cruciale menant aux accords de Genève de février 2021. Brouillage La multitude des candidatures ne permet pas de voir clair concernant les réelles intentions des uns et des autres parmi les poids lourds de la politique et si des noms ont été balancés juste pour faire monter les enchères. Ainsi, il y a Ibrahim Debbachi, l'ex-représentant permanent de la Libye à l'ONU, avant l'accord de Sekhirat de décembre 2015. Il y a également Aref Ennayad, l'ex-ambassadeur de Libye aux Emirats arabes unis ou encore Ali Tarhouni, l'ex-ministre du Pétrole dans le 1er gouvernement de la révolution, conduit par Mahmoud Jibril. D'autres noms sont également dans la course, comme l'ex-ministre des Affaires étrangères, Abdelhedi Houij, ou le porte-parole du Parlement, Abdallah Blihig ; des personnalités ayant déjà occupé des postes nécessitant un minimum de compromis, une expérience pouvant leur servir lors de l'actuelle échéance. Au-delà des noms des candidats, la question de la possibilité de candidature de l'actuel chef du gouvernement, Abdelhamid Dbeyba, est sur toutes les lèvres. A ce sujet, le juge de Benghazi, Jamel Belhaj, pense que la question n'est pas à l'ordre du jour de Dbeyba, qui ne vise pas la présidence de la République, mais plutôt celle de l'Exécutif, pour exercer le pouvoir, selon l'actuel régime politique libyen. «Dbeyba vise plutôt à soutenir des candidats aux parlementaires pour s'assurer une majorité qui le mènerait à la tête d'un nouveau pouvoir en Libye. Et c'est pour cela que ses supporters préfèrent reporter les élections, pour lui accorder le temps nécessaire à préparer son parti et ses candidats», ajoute Belhaj. Tunis De notre correspondant Mourad Sellami Advertisements