Le journaliste et auteur Mahdi Boukhalfa a signé son nouvel ouvrage intitulé La Cantera : il était une fois Bab El Oued paru chez les éditions El Qobia, le 18 décembre, à la librairie du Tiers-Monde, place Emir Abdelkader, à Alger. Ce grand journaliste et reporter, sociologue et urbaniste de formation ayant exercé à l'agence de presse nationale algérienne, APS ( Agence Presse Service) notamment, en 2003, à Rabat(Maroc) en tant que chef de bureau de l'APS et au sein de médias étrangers britanniques et français, Mahdi Boukhalfa, 66 ans, au vu de la fréquence de ses productions, prouve qu'il est disert. Coup sur coup, consécutivement, une profusion d'ouvrages. Mama Binette, naufragée en barbarie, aux éditions du Net (2019), La Révolution du 22 Février, chez Chihab Editions (2019), La Marche d'un peuple, les raisons de la colère (EDN, 2020) et Pavillon Covid-19, sept jours en enfer ( 2021) et le tout nouveau, intitulé La Cantera, il était une fois Bab El Oued aux éditions El Qobia (avril 2021). C'est une évidence, Mahdi Boukhalfa est prolixe. Il signe cette année, deux ouvrages. Et Il est déjà sur un autre essai. Il montre une facilité et une vélocité littéraire. La Cantera : il était une fois Bab El Oued, comme l'indique le titre, raconte l'histoire du quartier-ville de la capitale algérienne. Mahdi Boukhalfa est un fils du quartier, un citadin, raffiné et lettré qui se souvient du Bab El Oued d'antan. Il dépeint une cité tentaculaire protégée par la baraka du mausolée du Saint Patron d'Alger, Sidi Abderrahamane Ethaâlibi et la bénédiction de la Basilique de Notre- Dame d'Afrique. Où se mêle joie, drame, peur (sur la ville), douleur, espoir, souffrance, résistance ou encore tolérance. La dédicace de La Cantera : il était une fois Bab El Oued signée par l'auteur Mahdi Boukhalfa est significative : «A mon père, à Didi, et à tous ceux qui ont construit avec leur sueur et leur sans les immeubles de Bab El Oued. Aux gens de BEO et NDA, d'hier, d'aujourd'hui et de demain...» Un signe fort de reconnaissance et de respect aux anciens, aux ancêtres qui ont bâti cette cité, Bab El Oued. «Sublime» porte ouverte La Cantera : il était une fois Bab El Oued est avant tout un ouvrage autobiographique -la jeunesse de Mahdi Boukhalfa des années 1950, 1960, 1970, 1980 -, surtout nostalgique sans connotation péjorative, sociologique, olfactif, tactile, mélomane, exubérant, révolutionnaire, battant et combattant. Bab El Oued, «La Cantera», la dénomination hispanique voulant dire «la carrière», présente la dimension cosmopolite, où au marché – Mahdi Boukhalfa le souligne – «se croisaient musulmans, chrétiens, israélites, qu'ils soient Algériens, Espagnols, Français, Italiens, Maltais, dans une paix fragile- l'Algérie était colonisée par les Français depuis 1832-... » Dans Cantera..., on croise Albert Camus, Mouloud Mammeri, Amar Ezzahi, Guy Bedos, Roger Hanin, El Hachemi Guerouabi, Lili Boniche, John Wayane, Randolph Scott dans les ruelles, les cafés, les salles de cinéma Le Marignan, La Perle, Richelieu... «Le cardinal, El Hadj M'hamed El Anka, surclassait tout le monde. Il était l'idole, le maître du chaâbi...», s'enthousiasme Mahdi Boukhalfa. Quand la ville ne dort pas Plus loin, à la page 34, il écrit : «Ici, à Bab El Oued, il n'y a ni djabaili, ni chaoui, ni kbaili...C'est Bab El Oued...» On croise aussi des enfants de la Révolution, les martyrs. «J'évoque le plus souvent les noms de nos martyrs de la guerre de Libération et les met en évidence par rapport à ceux de la France coloniale...», indique Mahdi Boukhalfa. Les footeux de l'USMA, le Mouloudia, le Galia, l'OMSE, avaient le sang de Bab El Oued qui coulaient dans leurs veines et leur faisaient battre leur cœur. Dans ce livre de Mahdi Boukhalfa, on apprend que cette cité, Bab El Oued, est un lieu d'impact de l'immigration, à l'issue de la chute de Grenade en 1492. Mahdi Boukhalfa aime tant Bab El Oued qu'il qui écrira un ouvrage qui lui est dédié . Il nous confiera : «Vous me demandez si j'aime tant Bab El Oued, ce quartier ? Oui, absolument. C'est ma vie. Je suis né pratiquement à Bab El Oued, pratiquement un enfant de Bab El Oued. J'ai suivi mon cursus scolaire, j'ai fréquenté le lycée Emir Abdelkader à Bab El Oued. J'y ai appris à vivre et 'naviguer' pas tellement facile à l'époque dans un milieu urbain. Mais il y avait toutes les commodités pour vivre dans ce quartier qu'on ne le quitte pas. Comme les cinémas, les librairies, les plages, les restaurants, les lycées... La raisons qui m'a amené et poussé à écrire ce livre, c'est la destruction du marché de Bab El Oued. J'en étais très affecté par cette démolition. A l'époque coloniale, on l'appelait le marché de l'Alma. Pour nous, pour nos parents, c'était le marché de la Canterra. Cela veut dire : la carrière en espagnol. Parce que ceux qui ont vécu à Bab El Oued, ce sont des Espagnols, des immigrants, qui sont venus dans «les bagages» de la colonisation. Et ils ont trouvé le gîte et le couvert à la carrière du dey. Et c'est là, où ils commencèrent à travailler pratiquement comme tailleurs, casseurs de pierre. Et ces pierres qui ont servi justement à construire les premiers immeubles d'Alger. Il y avait nos parents, les Algériens qui avaient bâti cela avec des immigrants espagnols, pas nécessairement français, des immigrants napolitains, malatais qui avaient travaillé comme de simples ouvriers, manœuvres, tacherons de 1850 à 1900. Pour donner corps à nouveau milieu urbain. C'était d'abord Bab El Oued, puis il y eut l'extension à la place des Martyrs, Larbi Ben M'hidi, Dirouche Mourad, ex-rue Michelet... C'est pour cela que sur le plan urbanistique, vous avez les immeubles d'Alger, de Bab El Oued qui sont plus anciens que ceux de la rue Didouche Mourad ayant une nouvelle conception urbanistique comme les penthouses, à l'image de l'immeuble appelé de la Paramount. C'est un immeuble qui a été pratiquement construit après les années 1940. Il existe une très grande différence d'âge entre les immeubles... A Bab El Oued, vous avez des lieux où se rassemblaient les pickpockets, des rues où se concentraient les librairies, les disquaires... Donc, on y maraudait, allait acheter un livre, un disque... Il y avait des rues où il y avait une très grande concentration de cinéma. Comme l'actuelle avenue Boubella, c'était l'ex-avenue Guillemin, il y avait le Marignan, Variété, Plaza, Richelieu, le Sufresne, et un peu plus loin, vous aviez le Majestic, l'actuelle salle Atlas qui a été pratiquement 'bousillée'. On a plus le cinéma d'antan Majestic avec son toit ouvrant. L'unique cinéma qui avait un toit ouvrant en Afrique. Le seul cinéma qui avait deux orchestres (dont un bas) et le balcon. Le Majestic était un cinéma extraordinaire...» Mahdi Boukhala nous ouvre la porte sublime d'un beau vieux quartier libre. A lire. K. Smaïl
Mahdi Boukhalfa La Cantera : il était une fois Bab El Oued. Editions El Qobia 2021 Prix : 800 DA Disponible dans toutes les librairies (Librairie du Tiers-Monde, place Emir Abdelkader Advertisements