Cinq mois et demi après avoir été évoquée officiellement par le chef de l'Etat, l'amnistie générale reste un projet indéfini dans ses contours. Même si M. Bouteflika, lors de son discours prononcé le 7 avril à l'occasion de la conférence nationale des cadres de l'Etat, se déclarait s'en remettre à la volonté du peuple algérien. « Le moment venu, lorsque les conditions seront réunies, (je reviendrai) pour proposer à votre décision souveraine le choix de l'amnistie qui rallie déjà votre soutien », avait-il notamment déclaré. Or, jusqu'à l'heure actuelle, aucun débat de fond n'a été engagé au sein de la société. Alors que les ONG nationales concernées par cette question délicate soulèvent des points fragmentés autour de ce projet, les partis pour leur part se défendent en invoquant qu'ils ne connaissent pas encore le contenu de ce projet. C'est tout juste si certains prennent le raccourci de dire qu'ils sont « avec le programme du président de la République ». Pourtant, il semble bien que l'amnistie générale sera probablement le sujet qui va, les semaines et mois à venir, dominer l'actualité nationale. Cette question tend même à susciter, dès à présent, l'implication de parties étrangères. Comme cela a été le cas jeudi dernier où, à travers un communiqué commun, cinq ONG ont esquissé le contenu de ce projet. « La loi accordera l'exemption de la poursuite à n'importe quel membre d'un groupe armé, d'une milice d'Etat armée ou des forces de sécurité pour des crimes commis » durant la décennie noire, notent Human Rights Watch, Amnesty International, la Fédération internationale des droits de l'homme, le Centre international pour la justice transitionnelle et la Commission internationale des juristes. En l'absence d'un contenu clair de l'amnistie générale divulgué à l'opinion publique, c'est tout le débat autour de cette question qui demeure floué. Cela dit, le 10 mars dernier à Madrid, M. Bouteflika révélait que la « loi d'amnistie générale destinée à clore définitivement un chapitre douloureux de notre histoire » contribuerait « au démantèlement des groupes armés » encore actifs. D'ailleurs, il n'avait pas manqué, à cette occasion, de faire référence à la loi sur la concorde civile de septembre 1999. Un cadre considéré comme « une phase décisive pour le processus de réconciliation nationale ayant bénéficié à des milliers d'éléments impliqués dans des activités terroristes et qui ont repris une vie normale dans la société », fera-t-il remarqué. Cependant, il est à signaler que les choses semblent s'accélérer après la remise, fin mars dernier, du rapport sur les disparus par le comité ad hoc de la Commission nationale de promotion et de protection des droits de l'homme (CNCPPDH). Pour preuve, on note une offensive sur le terrain de la Commission nationale de l'amnistie générale (CNAG), née en décembre 2004 et dont le président d'honneur n'est autre qu'Ahmed Ben Bella. Cette structure est pourtant une commission « non officielle et non partisane », comme ne le cesse, à chaque fois, de le répéter son président exécutif, en l'occurrence Abderezak Smaïl. Mais jusqu'à présent, personne n'a trouvé à redire, ni sur l'existence de la CNAG ni sur ses activités.