Dans le cadre de son programme culturel Agora de la culture, la librairie Media Book à Alger a abrité hier une table ronde sur la traduction intitulée « La traduction, passerelle entre les civilisations ». Directrice de l'Institut supérieur arabe de traduction, Mme Meriem Bioud a mis l'accent dans son intervention sur les objectifs assignés à son institution. Objectifs basés sur la formation, la recherche et la production. Elle relève que son établissement se base en priorité sur la formation d'interprètes. « Il s'agit de notre priorité. La formation est de deux ans. Or être traducteur c'est toute une vie, d'autant qu'il faut avoir un bagage incommensurable en culture générale. L'institut a deux ans d'existence et nous n'avons pas cette prétention de résoudre tous les problèmes ayant trait à la traduction. Nous avons le projet de concevoir un dictionnaire sur les trouvailles et nouveautés relatives à la traduction. Un travail d'équipe pluridisciplinaire et de longue haleine », relève-t-elle. Elle estime que le travail d'interprète ou de traducteur ne doit pas être abordé d'une manière isolée. Avant de traduire ou d'interpréter, il faut, à entendre la même intervenante, se poser des questions, entre autres : que faut-il traduire en priorité ? Que veut-on traduire ? Existe-t-il un public qui puisse absorber les œuvres traduites (scientifiques et artistiques confondues). Existe-t-il une volonté politique quant à promouvoir la traduction ? De son côté, Marcel Bois - connu en Algérie pour avoir traduit vers la langue française des œuvres d'écrivains algériens de langue arabe, à l'exemple de Abdelhamid Benhadouga - juge nécessaire le travail de traduction de par le monde, en particulier en Algérie, vu les vicissitudes historiques vécues par ce pays. Pour le même intervenant, grâce à qui l'écrivain Mohammed Dib a découvert les œuvres de Benhadouga, « la traduction demande une grande patience et un bagage important en matière de culture générale ». Cela dit, il y a lieu de déduire à travers les débats qu'il faut faire de la langue un outil « maniable et maniable », d'autant qu'il s'agit d'un « produit social qui se développe et évolue en fonction de la société qui l'utilise ». Ainsi, il est plus que nécessaire de la momifier en lui donnant un caractère « sacré ». Traduire, c'est trahir, ainsi est-il dit. Certains refusent la sentence, car s'exprimer c'est déjà trahir sa propre pensée. Pour d'autres, on ne peut traduire une œuvre d'une langue vers une autre sans verser dans l'arbitraire, sachant que chaque langue porte des référents culturels. Traduire est une question de survie pour toutes les langues. L'arbitraire y est, mais faudrait-il en vouloir aux mots même s'ils nous ont fait découvrir les Freud, Shakespeare, Nietzsche, Dostoïevski, Kafka, Joyce, excusez du peu, non sans transgression.