C'est dans le cadre de la réforme sur la justice qu'un séminaire portant sur le rôle du médecin légiste est ouvert depuis hier à l'hôtel Sheraton à Alger. La médecine légale, qui rencontre toutefois peu d'engouement des étudiants en médecine, constitue pourtant l'élément clé dans la découverte de la vérité lors d'une enquête judiciaire. Cette spécialité, sous la coupe du ministère de la Justice mais qui se pratique en milieu hospitalier, allie savoir-faire scientifique et prérogatives juridiques. Le premier constat observé en Algérie et qui porte un coup majeur à la profession tourne autour du nombre d'experts en médecine légale : 110 sur tout le territoire national. Aucun médecin légiste dans les wilayas de Relizane, Tissemsilt, Tindouf et El Tarf. « Les moyens avec lesquels nous pratiquons la médecine légale sont rudimentaires », explique Dr Belhadj, médecin légiste à l'hôpital Mustapha à Alger. Aucune structure d'accueil ou d'accompagnement des familles, pas de laboratoire, de radiologie ou de bases de données... Les familles qui se présentent à un médecin légiste vivent généralement un drame. « Nous devons les accompagner à faire le deuil ou même parfois à accepter l'autopsie d'un proche », commente Dr Belhadj. En effet, le travail du médecin légiste comporte deux aspects : servir à la consultation médico-judiciaire tels les violences sexuelles, les coups et blessures, les accidents du travail, mais également un travail de thanatologie qui consiste à pratiquer des autopsies ou expertiser des ossements. « Ce dernier point a une importance majeure surtout lors de catastrophes naturelles. J'ai rencontré le cas de deux familles qui se disputaient une victime des inondations de novembre 2001 à Bab El Oued. Chacune était persuadée qu'il s'agissait d'un des siens. Dans ce cas, nous avons pu utiliser les méthodes liées à l'ADN. Mais c'est parce que le nombre de personnes dont il fallait faire des prélèvements était limité à quatre ou cinq individus », justifie le médecin expert. L'utilisation du système de comparaison génétique coûte très cher. En ce sens, les services de médecine légale ne peuvent y recourir. « Sauf s'il s'agit de lutter contre le crime organisé », précise Dr Belhadj. Les perspectives envisagées par le ministère de la Justice sont « la revue en hausse du nombre de médecins légistes et leur redéploiement géographique et rationnel, le renforcement des services de médecine légale en moyens humains et matériels et l'intensification des formations communes aux magistrats et médecins légistes », évoque le ministre de la Justice Tayeb Belaïz. Ce travail, qui consiste à renforcer la valeur de l'expertise judiciaire, trouve ses limites dans la pratique de corruption et de falsification de rapports médicaux. A cela, Tayeb Belaïz rappelle que certains juges, avocats et experts sont en prison. « Nous sommes prêts à rouvrir des dossiers si l'expert a été malhonnête », précise le ministre.