Les déclarations du commandant du groupement de gendarmerie de Tizi Ouzou à propos du redéploiement et du renforcement des dispositifs de sécurité dans la région ont fait réagir le mouvement des archs à travers ses deux tendances opposées. La CADC, dont le principal animateur, Belaïd Abrika, se trouve actuellement à l'étranger où il participe à des rencontres internationales, a rendu publique hier une déclaration signée par la « présidence tournante ». La coordination des archs écrit : « Les velléités de redéploiement exprimées par les responsables du corps de la gendarmerie en Kabylie, à l'occasion de soi-disant portes ouvertes, constituent une provocation à laquelle nous répondrons par des actions appropriées. » L'aile du mouvement citoyen dite « dialoguiste » poursuit : « Le départ de ce corps de sécurité de la Kabylie demeure toujours une exigence populaire que ni le temps ni les arguments fallacieux de sécurité ne sauront altérer. Les opérations de charme ne peuvent pas faire oublier à la population les martyrs et les blessés qui se comptent par milliers. » Tout en rappelant que la « mise en quarantaine de ce corps de gendarmerie est toujours en vigueur jusqu'à son départ définitif », la CADC rappelle que, s'agissant de la question sécuritaire, « la population qui réclame son droit légitime à la protection a déjà fait son choix pour les sûretés urbaines et il est évident que la présence des gendarmes est plus qu'indésirable en Kabylie ». Cette vive réaction de la CADC montre que la détente politique enregistrée depuis un an ne peut pas aller jusqu'à la réhabilitation brutale des responsables directs des événements dramatiques d'avril 2001. Les protagonistes de la crise le savent et il faut noter que les portes ouvertes sur la gendarmerie organisées ces derniers jours à Draâ Ben Khedda se seraient déroulées dans de moins bonnes conditions si elles avaient été programmées à Azazga ou à Fréha. Quatre ans après avril 2001, les blessures sont restées vives et les prouesses réalisées par Ahmed Ouyahia dans la conduite des négociations avec les archs n'autorisent pas le retour à la situation d'avant 2001, même si le pourrissement et la déliquescence enregistrés à tous les niveaux de la vie locale commandent le retour urgent à un climat de travail et de sécurité. La deuxième tendance des archs, dite antidialoguiste, ne se montre pas surprise par les derniers développements intervenus sur la scène locale. « Le redéploiement de la gendarmerie en Kabylie fait partie du processus de normalisation et des accords conclus », déclare Hocine Mammeri, l'un des animateurs de l'aile des archs qui se revendique de l'« opposition ». Il ajoute : « Le pouvoir continue dans la manipulation et seuls ceux qui ont pris langue avec les autorités doivent assumer la normalisation. Nous aurions cru à un changement dans l'attitude du pouvoir si on avait pris connaissance de procès des auteurs des assassinats. » N'annonçant pas d'actions « appropriées » dans le sillage de la CADC, les antidialoguistes se suffisent de dresser un constat désabusé de la situation : « Il n'y a pas que les gendarmes qui refont apparition. L'ex-ministre de la Justice (Ahmed Ouyahia) est également réapparu et est allé à Beni Douala le 18 avril dernier, en présence d'une partie des délégués. » L'opposition frontale entre les différentes tendances des archs renforce en fait le statu quo dans la région et constitue le véritable moteur de la « normalisation ». En l'état actuel de la démobilisation des structures de revendication, il est difficile d'envisager de réelles actions qui viendraient empêcher le rétablissement des structures de l'Etat dans tous ses démembrements.