C'est la 3e division d'infanterie algérienne qui libéra Marseille douze jours seulement après le débarquement de Provence, souligne l'historien André Kaspi, professeur à la Sorbonne et auteur de La Libération de la France. Cet auteur rappelle que quelque 150 000 combattants africains, regroupés en Sept divisions, sur un total de près de 400 000 soldats des forces alliées, débarquèrent sur les côtes de Provence dans le cadre de l'opération Dragoon lancée le 15 août 1994, dix semaines après le débarquement de Normandie. Un fait entièrement suffisant pour voir le président Bouteflika assister, dimanche prochain à Toulon, aux festivités du 60e anniversaire du débarquement de Provence. Hamlaoui Mekachera, ministre délégué français aux Anciens combattants, reconnaîtra lui-même que « des jeunes de 18, 20, 25 ans se sont jetés sur les plages de Provence pour que la France regagne la liberté et la démocratie ». Une reconnaissance qui vient rejoindre la lettre, datée du 9 août mais rendue publique uniquement hier, de Michel Barnier, ministre français des Affaires étrangères, adressée à la soixantaine de députés UMP opposés à la présence de Bouteflika à ces festivités. « C'est bien un hommage à la solidarité et aux sacrifices de tous ces peuples qui sera rendu le 15 août prochain à Toulon. Les Algériens ont à l'évidence pleinement leur place dans cette commémoration », précisera M. Barnier. Il est utile de souligner que ce ne fut pas la première fois que les soldats algériens, aux côtés d'autres bien sûr, se sacrifient pour la France. Lors de la Première Guerre mondiale (1914-1918), nos compatriotes étaient majoritaires parmi les combattants engagés dans les tranchées. Mieux, M. Barnier va plus loin encore. « Les affrontements qui ont déchiré nos deux peuples après la Seconde Guerre mondiale, dont je sais le souvenir douloureux qu'ils ont laissé en particulier chez les harkis, ne peuvent cependant pas affecter la reconnaissance que la nation éprouve à l'égard de ces soldats venus d'outre-mer pour participer à la libération du pays en 1944 », estime-t-il. Cette mise au point lui donne assez d'arguments pour avancer qu'il était « légitime que le président algérien, comme les autres chefs d'Etat concernés par cette page de notre Histoire, soit convié à cette commémoration ». Lundi dernier, l'Union nationale des harkis (UNH) s'était déclarée « profondément choquée de l'invitation faite par le gouvernement français au chef de l'Etat algérien ». C'est pourquoi le chef de la diplomatie française considère qu'il paraît « important, pour l'Algérie et la France, de surmonter le passé, sans l'occulter, afin de construire ensemble un avenir dépassionné dans lequel les deux peuples puissent mettre en commun tout ce qui les unit ». Cette ambition, ajoutera-t-il, voulue de part et d'autre au plus haut niveau, correspond au vœu des populations française et algérienne. En outre, le ministre français avait déclaré auparavant qu'un travail de mémoire commun a été engagé entre les deux pays et a produit « d'ores et déjà des résultats sur des questions concrètes ».