Les organisations patronales ne sont pas toutes de l'avis du Fonds monétaire international (FMI) qui, faut-il le rappeler, a conditionné toute augmentation de salaires dans notre pays par le taux de croissance hors hydrocarbures. Certains patrons d'entreprises sont allés carrément jusqu'à contredire les affirmations des experts du FMI. De leurs points de vue, d'autres paramètres entrent en jeu. « Au-delà des prix des hydrocarbures, nous avons, depuis 2001, prôné une politique visant l'amélioration du pouvoir d'achat à travers des augmentations substantielles des salaires », dira Omar Ramdane, président du Forum des chefs d'entreprise (FCE). Notre interlocuteur estime, par ailleurs, que la revalorisation des salaires passe nécessairement par la réduction des charges patronales. Il s'agit notamment des charges fiscales, des allocations familiales... « L'Algérie n'est plus sous le contrôle de cette institution financière pour qu'elle lui dicte ses recommandations », a-t-il affirmé. Faisant allusion aux « injustices sociales » charriées par les plans d'ajustement structurel, notre interlocuteur a remarqué qu'« à chaque fois que le FMI nous impose des lignes de conduite, cela aboutit souvent à des catastrophes sociales ». Yousfi Habib, président de la Confédération générale des entreprises algériennes (CGEA), abonde dans le même sens. Pour lui, il n'est pas du ressort du FMI de décider s'il doit y avoir ou non des augmentations de salaires, et le prix du baril ne devra, en aucun cas, intervenir dans la politique salariale. « La tripartite syndicat-patronat-gouvernement est la seule habilitée à trancher le nœud gordien des salaires », a-t-il relevé. « D'ailleurs, a-t-il précisé, la question de la revalorisation des salaires, qui fut l'une des revendications de l'UGTA, a été prise en compte dans le cadre de la dernière tripartite. » A ce sujet, il faut rappeler que l'article 87 bis de la loi 90-10 relatif au SNMG n'a pas pas été abrogé dans le cadre de cette tripartite. La porte n'est pas pour autant fermée, se plaisent à dire les esprits optimistes. « La tripartite est souveraine en la matière », estime M. Yousfi. Néanmoins, à ses yeux, l'augmentation des salaires ne doit pas être à l'ordre du jour. « Il faut d'abord réduire les charges patronales des entreprises pour leur permettre de faire face à la concurrence et de s'imposer sur le marché. C'est une question de compétitivité », a-t-il soutenu. Pour appuyer ses dires, le président de la CGEA, qui qualifie ces charges d'astronomiques, a relevé que « le fardeau qui pèse sur les entreprises a freiné la dynamique de recrutement ». Notre interlocuteur s'est déclaré, toutefois, sensible à la question de la dégradation du pouvoir d'achat. « Nous faisons des pieds et des mains pour améliorer la situation des travailleurs et développer l'économie nationale, mais l'Etat doit nous donner les moyens de le faire », a-t-il indiqué. Autre organisation patronale : la Confédération algérienne du patronat (CAP), par la voix de son président, en l'occurrence Boualem Merakech, a estimé que les déclarations du FMI ne sont pas en totale contradiction avec les revendications formulées par les organisations patronales. « Nous ne sommes pas contre une revalorisation des salaires pour peu que l'Etat procède à l'allégement de certaines charges fiscales et parafiscales », a-t-il insisté, avant de préciser que l'entreprise algérienne n'est pas suffisamment performante pour l'accabler davantage de lourdeurs qu'elle ne pourrait plus supporter. Ainsi, aux yeux de M. Merakech, « l'augmentation des salaires est une charge supplémentaire et l'augmentation des charges contribue, dans une large proportion, à la mise à mort des entreprises ».