Avides de sorties et de distraction, la population de la wilaya de Tizi Ouzou trouve peu d'espaces de loisirs et de divertissement. A l'exception des villes balnéaires et le chef-lieu de wilaya, dans les villages et communes de la haute Kabylie c'est tout simplement le marasme où l'on mène une vie casanière. En dehors de l'occupation des cafés maures où l'on s'adonne aux divers jeux de société, le villageois tente de s'économiser moralement en faisant contre mauvaise fortune, bon coeur. Les soirées de M'hend, un habitant d'Irdjen (Larbâa Nath Irathen), s'orientent exclusivement vers la marche et la pause café. «Puisque l'on ne propose rien à la télé, je fais un saut au café maure qui se trouve à 2 km du village, histoire de marcher pour aider la digestion et échanger une discussion avec quelqu'un». Et les enfants ? «Je les promène un peu tout près de chez moi après la rupture du jeûne, sinon, ils restent à la maison !» Nous sommes loin du profil du citadin riche et dépensier. Ainsi les journées ramadhanesques s'égrenent pour des milliers de familles rurales. Néanmoins, la direction du Théâtre régional Kateb Yacine de Tizi Ouzou est décidé à se rapprocher de la population rurale en leur proposant des soirées culturelles. Une caravane théâtrale a sillonné durant la première quinzaine plusieurs localités pour les sortir de leur engourdissement et briser la monotonie. Cette caravane compte 19 troupes, essentiellement des amateurs, issues des théâtres régionaux de quatre wilayas à savoir Tizi Ouzou, Béjaïa, Mascara et Batna qui animeront des spectacles et tenteront de mettre un peu de couleurs aux soirées fastidieuses des bourgs de Larbâa Nath Irathen, Aïn El Hammam, Illilten, Tifilkout, Zoubga, Ighefillen, Issers, Draâ Ben Khedda, Tizi Rached, Azeffoun, Tamda, Mizrana et Timizart. En dépit du manque de structures, les activités sont accueillies sur les placettes des villages (Thajmaâth) ou dans les cours des écoles primaires. Tizi Ouzou, il est 22h. Les rues grouillent de monde à la sortie des mosquées. Dans cette ville, l'ambiance monte d'un cran. Les familles n'étant pas pantouflardes, la vadrouille, «le sport nocturne», commence quelques minutes après la rupture du jeûne. Hommes, femmes, enfants ; les Tiziouziens s'empressent dans la rue animée par le va et vient incessant des automobilistes qui se rejoignent sur l'axe boulevard Abane Ramdane (centre-ville)-boulevard les frères Beguaz (La Tour). La télévision algérienne étant rebutante particulièrement en ce mois, les citadins lui préfèrent la dégustation d'une coupe de glace et fuir la chaleur des appartements. Plus chanceux que leurs concitoyens de la haute montagne, les riverains ont le choix entre des soirées musicales à la maison de la culture Mouloud Mammeri ou promener les enfants au Parc de loisirs de la ville qui devient une destination prisée par les familles. Le point fort de cet espace culturel et de loisirs est la sécurité et la variété des activités proposées. Du manège pour enfants, du spectacle musical pour tous les goûts, la piscine pour ceux qui désirent se rafraichir. Le jardin public Mohand Oulhadj, très fréquenté dans la journée, est fermé au visiteur la nuit. Son coup de lifting lui a valu une affluence appréciable des couples, des familles et des badauds. Assis sous un abribus, à la cité Krim Belkacem, Ismaïl est animateur et amateur de musique. Lui, préfère se regrouper avec ses amis pour jouer à la guitare. Une qaâda, faut-il le souligner, conviviale accompagnée de thé et de café sous le même abribus. «Je ne bouge pas d'ici, je ne me rends pas à la maison de la culture, car l'ambiance et le programme qu'on me propose comme spectacle ne m'intéressent pas qualitativement, excepté deux ou trois soirées», dit l'animateur. Abderrahmane, mécanicien, se demande ce que devient le Théâtre régional Kateb Yacine, lui qui est cinéphile. La structure est, en effet, hors service à cause d'interminables travaux de restauration et de rénovation. Le théâtre Kateb Yacine rouvrira ses portes aux cinéphiles et aux passionnés du théâtre en septembre prochain, selon des informations officielles.