Les députés n'ont pas manqué de souligner, devant le gouverneur de la Banque d'Algérie, les contradictions autour du taux de croissance de l'économie entre le ministère des Finances et l'institution monétaire. Les réserves de change de l'Algérie ont atteint les 147,22 milliards de dollars à fin 2009. Mohamed Laksaci, gouverneur de la Banque d'Algérie, a présenté hier le rapport annuel de conjoncture économique devant l'Assemblée populaire nationale (APN). Excepté une baisse de la valeur des exportations et de la fiscalité pétrolière, tous les autres voyants sont au vert. L'Algérie a enregistré en 2009 une «forte croissance économique hors hydrocarbures de 9,3%», selon lui. La croissance hors hydrocarbures a été portée par la «bonne» performance de la production agricole, des services et du bâtiment et des travaux publics. Des députés n'ont pas manqué de créer la cacophonie autour des chiffres fournis par la Banque d'Algérie et le gouvernement du Premier ministre Ahmed Ouyahia sur le niveau de la croissance hors hydrocarbures, les réserves de change et l'inflation. «Nous avons remarqué une dangereuse contradiction entre les chiffres présentés par le gouverneur de la Banque d'Algérie et le ministre des Finances. Alors que le premier parle d'un taux de croissance de 9,3% hors hydrocarbures pour l'année 2009, le second avançait le chiffre de 6% pour la même année. L'écart est tout de même assez grand», s'est emporté Gouini Fellali, député du mouvement El Islah, en appelant à la mise en place d'une «commission d'enquête» pour lever le voile sur cette contradiction. Même constat dressé par Hakim Saheb, député du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) : «Comment expliquer cette contradiction ? » Mohamed Hadibi, d'El Islah aussi, évoque d'autres contrastes relatifs au niveau des réserves de change : «Le gouvernement avançait le chiffre de 144 milliards de dinars de réserves de change en 2009 et la Banque d'Algérie parle aujourd'hui de 147 milliards. On ne comprend rien à ces contradictions.» Un député du MSP a souligné que la non-maîtrise du phénomène de l'inflation grève le budget des ménages, en proposant la convertibilité du dinar. En 2009, l'inflation avait enregistré son plus haut niveau durant la dernière décennie à 5,7%, selon M. Laksaci ; elle est calculée à partir de la moyenne annuelle de l'évolution des prix des produits de consommation. Là encore, líOffice national des statistiques (ONS) évoquait le taux de 4% en 2009. Une autre asymétrie que certains élus n'ont pas manqué de mentionner. Ils se sont díailleurs interrogés sur la fiabilité des chiffres officiels. Par ailleurs, certains députés ont remis sur le tapis la question de la forte dépendance de l'économie nationale des hydrocarbures, la paralysie du réseau bancaire due au manque de liquidités, l'explosion du marché informel de la devise. «Il n y a rien de réjouissant dans le rapport présenté. Nous continuons toujours à dépendre des seules ressources du pétrole», affirme un député du MSP. La production pétrolière de l'Algérie génère près de 98% de ses recettes extérieures. Sur un autre chapitre, ce député s'est demandé si l'Algérie disposait réellement de mécanismes de contrôle des banques pour éviter le remake de l'affaire Khalifa. Un autre, de la même obédience, a interpellé le gouverneur sur l'urgence de mener jusqu'au bout la réforme des banques publiques. Evoquant le marché parallèle de la devise, il a soutenu que «des sommes importantes empruntent ce marché sans aucune forme de contrôle et dans l'impunité totale». Plusieurs intervenants ont déploré le manque de liquidités actuellement au niveau des banques et des agences d'Algérie Poste, au grands dam des clients.