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L'Etat doit se substituer à la défaillance de la famille Me Nadia Aït Zaï. Juriste et directrice du Centre d'information et de documentation sur les droits de l'enfant et de la femme (CIDDEF)
- Que pensez-vous de l'existence du phénomène du travail des enfants en Algérie ? Ce reportage véridique d'enfants algériens travaillant aux abords de la cimenterie me fait penser aux enfants du Pakistan fabriquant des briques ou à ceux de l'Inde dans les décharges à la recherche de quoi nourrir leur famille. La pauvreté a-t-elle frappé à nos portes pour que des enfants s'offrent en spectacle ? Sont-ils à la recherche d'une pépite lorsqu'ils ressortent poussiéreux de ce travail ? Dix dinars, ils ne gagnent que dix dinars. Se peut-il que l'Algérie, qui a investi dans l'éducation, la santé, la protection de l'enfant, accepte ce phénomène de l'exploitation de l'enfant par des revendeurs de ciment laissé au fond de la cocotte ou se peut-il qu'elle les laisse se substituer à leurs parents défaillants dans l'incapacité de nourrir leur famille ? L'enfant doit être à l'école et non dans la rue. La scolarisation des enfants jusqu'à l'âge de 16 ans est un droit. - Qui en sont les premiers responsables ? Les parents, évidemment, ils ont un devoir de surveillance, une responsabilité, ils doivent veiller sur la santé morale et physique de leurs enfants. La défaillance entraîne une déchéance de la puissance paternelle et souvent une sanction pénale. Dans notre droit, c'est le père qui est détenteur de puissance paternelle, il est le tuteur de l'enfant. Si sa défaillance est confirmée, l'enfant peut lui être retiré et placé soit dans une famille d'accueil, soit dans un milieu institutionnel. Mais est-ce la bonne solution ? - Qui doit garantir une protection des droits de l'enfant ? L'Etat bien sûr, mais jusque-là les sanctions préconisées n'ont jamais été prononcées contre des parents défaillants dans l'éducation et la surveillance de leur progéniture. Pourtant, ces enfants, scolarisés ou non, sont utilisés dans des tâches ingrates, alors que la loi interdit de faire travailler un enfant de moins de 16 ans. Si l'interdiction légale est affirmée, la sanction contre les employeurs n'est pas assez dissuasive. 2000 DA d'amende et en cas de récidive une peine de prison de 15 jours à deux mois est prononcée sans préjudice d'une amende qui peut s'élever au double de celle prévue initialement. Nous estimons que ce n'est pas assez et que la sanction doit être plus étudiée. - Pourtant l'Algérie a ratifié la Convention des droits de l'enfant… La loi algérienne protège les enfants, mais les conventions internationales auxquelles a souscrit l'Algérie les protègent davantage. Outre la convention des droits de l'enfant ratifiée par l'Algérie le 19 décembre 1992, la convention 162 concernant l'interdiction des pires formes de travail des enfants et l'action immédiate en vue de leur élimination, complétée par la recommandation 190 qui s'attaque à la vente et à la traite des enfants et à leur exploitation ont été adoptées par l'Algérie le 28 novembre 2000 et publiées dans le Journal officiel. La ratification suppose l'intégration de ces conventions dans le droit algérien. Au niveau régional, en 1990, l'Organisation de l'unité africaine a adopté la charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant africain. Charte ratifiée et publiée dans le Journal officiel algérien le 8 juillet 2003. La charte reconnaît la position unique et privilégiée que l'enfant africain occupe dans la société avec d'importantes responsabilités au sein de la famille. La charte introduit la notion de droits et de devoirs. Un droit accordé à l'enfant dans la charte signifie un devoir correspondant. S'inscrivant dans les grands principes de la convention des droits de l'enfant, la charte se particularise en attribuant des responsabilités à l'enfant africain. Néanmoins, ces responsabilités ne doivent pas être comprises comme une obligation pour l'enfant de prendre en charge ses parents en cas de défaillance. - Comment lutter contre le travail des enfants ? Ce sont les pays africains et particulièrement l'Algérie qui doivent se substituer à la défaillance de la famille par la mise en place de services d'appui et d'aide aux familles nécessiteuses.