Les producteurs nationaux appréhendent d'ores et déjà les impacts des nouvelles dispositions réglementaires adoptées par le ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière en juin dernier contenues dans le cahier des charges et relatives à l'importation de médicaments. Le risque de « dérapage » dans ce secteur, où il est question de santé publique, est à craindre, selon les opérateurs. L'invitation qui leur a été adressée par la direction de la Pharmacie, dimanche dernier, pour la remise des programmes prévisionnels d'importation de produits pharmaceutiques pour l'exercice 2006 « répondant aux critères énoncés par l'arrêté du 6 juin 2005, fixant le cahier des conditions techniques d'importation de produits pharmaceutiques destinés à la médecine humaine » - une procédure qui intervient traditionnellement en février - en est une première source d'inquiétudes. D'autant que ces derniers n'ont jamais été associés à l'élaboration de ces nouvelles mesures, quand bien même ils seraient les premiers concernés. Des demandes d'audience des opérateurs, réunis au sein de l'UNOP, adressées à Amar Tou, ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière sont restées sans réponse. « Alors que des laboratoires étrangers qui viennent tout juste de s'installer sont reçus au département de Amar Tou », fait-on remarquer. En attendant le rendez-vous prévu demain, les opérateurs redoutent la non-application des mesures de sauvegarde de la production nationale consacrées par l'ordonnance présidentielle n°03- 04 du 19 juillet 2003 et le décret du chef du gouvernement du 22 juin 2005. Craignant une situation aux conséquences catastrophiques qui pourraient être engendrées par cette ouverture « anarchique » du marché, l'Union nationale des opérateurs en pharmacie (UNOP) n'a pas manqué, à chaque fois que l'occasion lui est offerte, de tirer la sonnette d'alarme. La dernière en date est la lettre adressée, le 30 novembre dernier, au directeur de la pharmacie, M. Maghlaoui, lui rappelant qu'il était convenu, lors de la réunion du 14 novembre, une rencontre à laquelle a pris part le Syndicat algérien de l'industrie pharmaceutique (SAIP), de « se réunir sur votre proposition le 30 novembre pour faire le point sur la liste actualisée des produits fabriqués localement et nous avions demandé l'application de l'ordonnance présidentielle et du décret du chef du gouvernement ». L'UNOP ne comprend pas le report de ce rendez-vous au 14 décembre auquel sont invités tous les opérateurs des produits pharmaceutiques alors que la réunion était prévue le 30 novembre. L'Unop affirme ne pas comprendre non plus « l'empressement de signer les programmes pour l'exercice 2006, sans attendre les résultats des négociations engagées ». A noter qu'une copie de cette lettre a été adressée à Amar Tou. L'UNOP et le SAIP s'interrogent, ainsi, sur la précipitation dans laquelle les programmes de 2006 seront signés. D'après eux, rien ne presse d'autant que l'Algérie n'est pas près de finaliser le processus de son accession à l'OMC. Ils citent, entre autres, l'exemple de la Tunisie qui, malgré son adhésion à l'Organisation mondiale du commerce, a élaboré un système de corrélation qui lui permet de protéger sa production nationale. A noter que l'UNOP et le SAIP ont établi et présenté au ministère de la Santé des listes additives à celle des 128 produits interdits à l'importation. Il est donc relevé environ 250 produits, toutes formes et tous dosages confondus, qui sont disponibles sur le marché. Il est clair, ainsi, selon ces professionnels, que la non-protection de la production nationale se traduirait à court terme par la faillite de bon nombre d'entreprises qui ont contracté des prêts bancaires et la perte de près de 10 000 emplois. Les prévisions de fabrication pour l'année 2006, qui avoisinent les 400 millions de dollars, risquent d'être compromises.